La douleur aiguë, douleur-symptôme, peut être considérée par le clinicien (et perçue par l'organisme) comme un signal d'alarme utile. En revanche, la douleur chronique, douleur-maladie, persistant au cours du temps, ne peut être simplement assimilée à une douleur aiguë qui perdure. Elle est associée à de profondes altérations des systèmes neuronaux impliqués dans le traitement de l'information nociceptive 1 . Ces changements affectent aussi bien les premiers maillons intervenant dans la genèse et le transfert des messages nociceptifs (c'est-à-dire les neurones sensoriels primaires), que la corne dorsale de la moelle épinière, où ces neurones établissent leurs premiers relais synaptiques, et certaines structures cérébrales (Figure 1).
Médiateurs chimiques et douleurUn grand nombre de médiateurs chimiques jouent un rôle dans l'induction, la transmission et la modulation des messages nociceptifs. Lors d'une inflammation péri-phérique, des molécules synthétisées et libérées dans le foyer inflammatoire, comme les prostaglandines, la bradykinine, la sérotonine, certaines cytokines et le NGF (nerve growth factor), agissent directement sur les terminaisons des neurones sensoriels primaires pour les stimuler, les sensibiliser à l'action d'autres molécules, ou encore modifier leur phénotype. C'est ainsi que l'expression de nombreux neuropeptides tels que la substance P (SP), le CGRP (calcitonin gene-related peptide), les peptides opioïdes ou la galanine, est altérée au sein même de ces neurones et/ou dans des neurones spinaux. De plus, la synthèse, le transport et la densité des récepteurs de certaines de ces molécules sont profondément modifiés (Figure 1). Cytokines pro-inflammatoires et douleur > Récemment, plusieurs équipes ont montré l'intérêt potentiel des transferts de gènes, à l'aide de divers vecteurs, dans des modèles animaux de douleurs chroniques. Le transfert de gènes codant pour des précurseurs de peptides opioïdes endogènes, conduisant à la production -dans la moelle épinière ou les neurones sensoriels primaires -de grandes quantités de peptides physiologiquement actifs qui en dérivent, se traduit par une diminution marquée des douleurs chroniques d'origine inflammatoire ou neurologique. D'autres molécules, comme les cytokines, impliquées dans l'induction ou la persistance des douleurs, représentent des cibles potentielles de ces approches. Bien que des progrès importants aient été réalisés dans le développement des vecteurs utilisés, leur innocuité reste à démontrer chez l'homme avant d'envisager la thérapie génique des douleurs chroniques rebelles aux traitements actuellement disponibles. Article disponible sur le site