Résumé
Introduction
Le traitement traditionnel des traumatismes des membres par des tradipraticiens est omniprésent dans les sociétés africaines au sud du Sahara. Ces pratiques sont source de nombreuses complications. Cette étude se propose de préciser le profil de ces complications et d’identifier les facteurs favorisant le recours à ces tradipraticiens.
Matériel et méthodes
Étude descriptive et analytique sur 12 mois, du 1er février 2018 au 31 janvier 2019, concernant tous les patients ayant consulté dans le service de chirurgie du Centre hospitalier universitaire Le Bon Samaritain de N’Djamena (CHUBS) pour une complication de fracture ou de luxation au niveau d’un membre qui avait été prise en charge par un tradipraticien. Le recueil des données a été fait à l’aide d’un questionnaire préétabli avec un recul moyen de 14 mois.
Résultats
Sur 144 patients atteints de traumatismes des membres, 47 souffraient au moins d’une complication de fracture ou de luxation suite à un traitement traditionnel, soit 33 % des cas. Parmi eux, 32 ont été retenus pour l’étude. L’âge moyen était de 23 ± 3 ans (extrêmes de 10-61) et le sex-ratio de 2,6 en faveur des hommes. La provenance était majoritairement rurale. Les élèves/étudiants et les cultivateurs/éleveurs étaient les plus représentés. Les accidents de la circulation routière étaient les plus rencontrés (n = 20). L’influence de l’entourage (n = 14) a représenté le premier facteur conduisant au choix d’un traitement traditionnel. L’attelle en bois n’immobilisant pas les articulations proximales de la fracture, associée au bandage ischémiant à l’origine des gangrènes, a constitué le premier mode de contention (n = 15). Le délai moyen entre le traumatisme et le début du traitement traditionnel était de 8,5 heures. Le délai moyen entre le traitement traditionnel et la survenue des complications était de 106 jours (extrêmes de 1-302). L’œdème du membre, le cal vicieux, la gangrène et la pseudarthrose ont représenté les complications les plus fréquentes. La lésion initiale a été une fracture fermée dans la plupart des cas (n = 22) avec une prédominance des membres inférieurs (n = 22). La prise en charge hospitalière a été chirurgicale (n = 19) ou orthopédique (n = 13). L’évolution thérapeutique a été bonne, assez bonne ou mauvaise, respectivement dans 24, 2 et 6 cas.
Conclusion
Les complications des traitements traditionnels des lésions traumatiques des membres sont graves. Une formation des tradipraticiens sur la connaissance des notions élémentaires d’immobilisation et la reconnaissance des signes de gravité, leur collaboration avec les structures de santé ainsi qu’une gratuité des soins dans les services hospitaliers permettraient de réduire ce phénomène. Les médias et réseaux sociaux devraient permettre de toucher un large public.