La coupure entre savoir expert et savoir profane n'a pas attendu le développement des nouvelles technologies de l'information pour être mise en cause ; le savoir expert n'est pas plus synonyme de vérité intangible que celui des profanes n'est tout entier du côté du subjectif et du local ; la vielle coupure entre les « savants » (ceux qui ont acquis et parfois inventé de nouvelles connaissances) et les « sachants » (ceux dont la connaissance a été acquise dans l'action, par le savoir vécu transmis, mais aussi conquise en réponse à une question, à un problème personnel particulier) s'estompe vers un autre partage des savoirs (Delmas-Marty, 2007). Les travaux sur les controverses scientifiques ont montré comment les exigences de standardisation auxquelles doivent se soumettre les scientifiques aboutissent à une définition abstraite et générale mais aussi lacunaire et réduite du réel (Wynne, 1999) ; du coup, les savoirs profanes ne sont plus vus seulement comme l'expression de ceux qui ne savent pas ou ne comprennent pas, mais plutôt comme des connaissances et des points de vue qui peuvent être aussi établis, aussi fondés, aussi rationnels, aussi utiles que ceux des scientifiques (Epstein, 1995). Dès lors, comme toute connaissance, le savoir profane ne se réalise pas exclusivement dans des pratiques implicites ou informelles ; il passe par des dispositifs, des façons de faire sens, des supports, des bases de données, des textes… et aussi, a minima, par la restitution de recherche d'informations, l'exploitation des données existantes, le recueil de documents, la diffusion de renseignements, de messages, de résultats.