L'abbaye cistercienne de Clairvaux a été fondée en 1115 par Bernard de Fontaine, à une quinzaine de kilomètres de Bar-sur-Aube. À la suite de la Révolution, elle a été vendue à un entrepreneur, avant d'être rachetée par l'État et transformée en maison centrale en 1808 1 . La plus grande abbaye d'Europe devient alors la plus grande prison française, les détenus remplaçant les moines pendant plus de 160 ans : l'ancien réfectoire sert de chapelle pour les prisonniers ; le cloître est aménagé en cours de promenade ; des cellules individuelles (« cages à poules ») sont disposées à la fin du XIX e siècle dans les appartements des moines du XVIII e siècle. En 1970-1971, les détenus sont transférés dans de nouveaux bâtiments construits au nord du site, toujours à l'intérieur du mur d'enceinte. Si l'actuelle maison centrale dépend toujours du ministère de la Justice, les bâtiments « historiques » sont passés sous tutelle du ministère de la Culture en 2002 et peuvent être visités 2 . Maintes fois annoncée, la fermeture de la maison centrale a été décidée par le garde des sceaux en avril 2016 et devrait être effective au premier semestre 2023. Depuis cette annonce, l'avenir du site est très incertain, l'État projetant de détruire tout ou partie des bâtiments de détention actuels 3 . Or Clairvaux livre une stratigraphie unique de l'histoire carcérale française, depuis la Révolution jusqu'au XXI e siècle et sa préservation constitue un enjeu patrimonial majeur.