D'après la théorie du capital humain, les individus sont rémunérés selon leur productivité, productivité qui dépend elle-même du niveau de diplôme ou du nombre d'années d'études. Mais à l'heure où l'éducation certifiée est discutée comme filtre, qu'en est-il de la valorisation des compétences, notamment de base, sur le marché du travail français ? Alors que de nombreuses recherches ont déjà été réalisées à ce sujet (dans les pays anglo-saxons principalement), aucune n'a encore été conduite sur cette thématique en France. Cette présente étude cherche alors à déterminer, via un modèle d'Heckman en deux étapes, dans quelle mesure l'accès à l'emploi et les salaires sont expliqués par le niveau en littératie, en numératie et en compréhension orale. Notre approche aura pour principal avantage de tenir compte d'un éventuel biais de sélection dans l'estimation des équations de gains, tout en appréhendant l'influence exercée par les compétences de base dans l'accès à l'emploi.Si le diplôme reste un « rempart » contre le chômage (CEREQ, 2011), il semble ne plus suffire au regard des difficultés croissantes d'insertion professionnelle. Pour certains économistes, l'augmentation du nombre de diplômés parallèlement à un rationnement des offres d'emploi, a en réalité contribué à la dévalorisation de l'éducation certifiée et plus précisément du diplôme (Baudelot & Glaude, 1986 ; Lemistre, 2003). L'affaiblissement du diplôme en tant que signal d'employabilité (Spence, 1973) suppose de fait qu'il est de plus en plus difficile pour les employeurs de discerner les travailleurs les plus productifs. Dans ce contexte, Albrecht et van Ours ( 2006), Duru-Bellat (2006) ont souligné les difficultés croissantes du système éducatif à donner à travers le diplôme une juste idée des capacités individuelles, ce qui impose de nouveaux « filtres » qui accroîtraient l'inégalité héritée entre individus. Nous suggérons alors que le rendement du nombre d'années d'études certifiées perd de son acuité au profit d'un autre type de signal plausible : le niveau de compétence. Ce dernier est susceptible d'améliorer l'explication de l'accès à l'emploi et des salaires. Malgré un même diplôme ou une expérience professionnelle identique, l'hétérogénéité salariale existe d'un individu à l'autre, du fait que les compétences ne s'acquièrent pas uniquement au sein du système éducatif (famille, activités associatives, loisirs, réseau social...), ni par le seul apprentissage du métier. Comme le rappellent Place et Vincent ( 2009), « si la corrélation entre les diplômes et les niveaux de compétences est fortement positive, le lien n'est pas systématique. Plus de 12% des personnes ayant seulement un certificat d'études primaires se retrouvent ainsi dans l'un des deux meilleurs groupes de compétences. A l'inverse, près de 9% des personnes dont le diplôme le plus élevé est le baccalauréat sont dans les deux niveaux les plus faibles ». Ce présent travail a donc pour ambition de déterminer dans quelle mesure les compétences de base, essentielles à la vie quotidienne et pro...