Les nuages constituent un sujet poétique qui se situe, du Moyen Âge jusqu'à l'époque contemporaine, à la croisée des traditions discursives, tout d'abord entre les discours théologique, scientifique et littéraire, mais aussi entre ceux qui relèvent de la philosophie, de la politique, de l'éthique, de l'esthétique etc. 1 Pour étudier l'emploi du motif dans la littérature française, il importe donc d'embrasser une multitude d'aspects, issus de contextes différents, parfois opposés, mais souvent convergents, car le thème du ciel nuageux présente une grande complexité. Ainsi, l'interprétation peut par exemple porter sur l'explication rationnelle du phénomène météorologique ; sur la description des nuages comme des images de la nature qui symbolisent le fugitif et l'éphémère ainsi que le mouvement et la transformation ; sur leur fonction de métaphore exprimant l'énigmatique, le merveilleux, le métaphysique et le désir d'ailleurs ; enfin, les images que les nuages dessinent dans le ciel peuvent être considérées comme des figures de projection, des miroirs de l'âme humaine, des produits de l'imagination ou comme paradigme de la création artistique 2. Par conséquent, nous entendrons le terme de « néphologie », forgée à la fin du XIX e siècle pour désigner la science des nuages comme une branche de la météorologie, dans un sens plus extensif, qui englobe l'ensemble des disciplines concernées, c'est-à-dire les « deux discours : celui de la science qu'on dit exacte » et « celui de la science qu'on dit humaine » (Serres, 1980, p. 58). Les discours sur les nuages dans la littérature française Géographie et cultures, 85 | 2013