Dans cet article, nous cherchons à montrer les différents sens sociaux qu’a pu prendre la langue d’oc au cours de la longue histoire du mouvement militant d’oc au sud de la France (ou Occitanie), du XIX e au XXI e siècle. Nous basant sur différents travaux historiographiques, sur des documents historiques et sur un travail de terrain en Provence, nous nous intéressons plus spécifiquement à trois périodes : celle qui voit naître un mouvement militant structuré au milieu du XIX e siècle, les années 1960- 1970, et la période contemporaine à partir des années 2000. Chacune de ces phases du mouvement s’inscrit dans des logiques plus larges, du réveil des nationalismes des années 1840-1850 aux mouvements pour les droits civiques des années 1960-1970 et aux mouvements globaux de lutte pour la préservation de la diversité linguistique, culturelle et biologique qui marquent notre époque. Dans ce texte, nous montrons comment la langue fonctionne comme une catégorie très plastique, permettant d’articuler une grande diversité de discours – et d’entrer de manière légitime sur des marchés d’idées et de discours auxquels ceux qui les portent n’auraient par ailleurs peut-être pas accès. Loin d’être des marques d’un passé qui s’efface, les mouvements militants en faveur des langues minoritaires participent en ce sens pleinement dans les époques dans lesquelles ils s’inscrivent. En comprendre la rationalité, c’est donc aussi mieux comprendre le monde dans lequel nous vivons.