La grossesse s'accompagne de nombreuses modifications endocriniennes, hémodynamiques, rénales, immunitaires, etc., qui ont été plus ou moins bien étu-diées. On connaît particulièrement mal les phénomènes d'adaptation à la grossesse au cours des premières semaines qui suivent la fécondation de l'ovocyte. Pourtant, il est fort probable que des problèmes liés à cette adaptation contribuent au développement des principaux syndromes associés à la grossesse, telles l'hypertension gestationnelle ou prééclampsie et la restriction de la croissance intra-utérine (RCIU). La prééclampsie est une maladie multisystémique spé-cifique à la grossesse et d'une morbidité élevée pour la mère et son enfant. Principale affection périnatale, elle affecte entre 3 et 6 % des premières grossesses dans les pays industrialisés, cette proportion est beaucoup plus considérable dans les pays peu développés [1]. C'est aussi une maladie dont l'origine demeure inconnue et qui a été, au cours des années, l'objet d'hypothèses relevant des courants qui ont traversé la science biomédicale. Ainsi, on l'aurait attribuée à une attaque oxydante, un processus inflammatoire, une mésadapta-tion hémodynamique ou un déséquilibre endocrinien ou métabolique, etc.[2]. Depuis une quinzaine d'années, un certain nombre de chercheurs estiment qu'une dysfonction endothéliale, résultant de la faillite de l'invasion trophoblastique des artères spiralées utérines, accompagnée d'une attaque oxydante, entraveraient le processus physiologique d'adaptation à la grossesse et mèneraient à la prééclampsie [2]. Ainsi, on a entrepris des essais cliniques destinés à prévenir la prééclampsie fondés sur l'ingestion de suppléments de vitamines C et E (anti-oxydants) [3]. Il a fallu arrêter ces études, parce que les suppléments vitaminés provoquaient des effets indésirables sur le foetus. C'est pourquoi nous devons reconsidérer les mécanismes de ce syndrome. On a avancé, par exemple, l'hypothèse selon laquelle des anticorps agonistes des récepteurs AT1 de l'angiotensine, de concert avec le FLT1 soluble (fms-like tyrosine kinase 1), joueraient un rôle dans la genèse de cette affection [4]. On a aussi attribué à une augmentation du volume sanguin, associée à un trouble de la gestion du sodium par le rein, la mobilisation d'inhibiteurs de la Na/K-ATPase (bufodiènolides) qui nuirait à l'invasion trophoblastique des artères spiralées [5]. Salas et al.[6] ont suggéré que chez la femme l'expansion retardée ou lente du volume sanguin et l'élévation rapide de la production de progestérone (antagoniste de l'aldosté-rone ?) installeraient, avant le 2 e trimestre, les conditions propres à provoquer au 3 e trimestre l'apparition > Malgré l'accès plus généralisé aux soins préna-taux dans les pays développés, on connaît très peu les mécanismes qui régissent l'adaptation maternelle à l'état physiologique qu'est la grossesse. Deux études récentes nous rappellent que certains phénomènes se manifestent très tôt lors de la grossesse et que le succès de leur mise en place assurerait la poursuite d'une g...