Cet article vise à présenter et analyser la carrière et l'oeuvre de Viviane Isambert-Jamati, figure majeure de la sociologie de l'éducation en France de la seconde moitié du xx e siècle, disparue le 19 novembre 2019. Venue de la sociologie du travail, celle-ci a occupé pendant plus de trente ans une position très originale dans le paysage de la sociologie de l'éducation. Elle affirme, dès 1969, que « la détermination des liens entre l'état d'une structure sociale et l'état du système scolaire qui lui correspond est sans doute le problème central de la sociologie de l'enseignement, mais le moins avancé. Affirmer globalement que l'école est à la fois le reflet de la société et le moyen de consolider son ordre est facile. Mais il est beaucoup plus ardu d'aller au-delà des correspondances approximatives et de mettre au jour les médiations ». Tout son travail s'est dès lors déployé selon trois grandes orientations, toujours croisées avec la question des inégalités sociales :-l'étude des transformations des systèmes scolaires dans leurs rapports avec les structures sociales et leurs évolutions ;-celle des principaux acteurs de ces systèmes scolaires, de leurs pratiques et représentations et des variations de celles-ci selon les contextes ;-la prise au sérieux de la spécificité des institutions scolaires et de celle des contenus de connaissance qu'elles transmettent à leurs élèves. Cet article vise donc à souligner l'originalité et la fécondité de son travail, puis à présenter neuf de ses textes publiés entre 1973 et 2005, devenus depuis lors peu accessibles, et qui figurent dans ce dossier spécial par lequel la Revue française de pédagogie a souhaité lui rendre hommage. Mots-clés (TESE) : sociologie de l'éducation, système d'enseignement, politique en matière d'éducation, pratique pédagogique Une grande dame s'en est allée. Viviane Isambert-Jamati, professeure émérite de Sciences de l'éducation de l'université René-Descartes, est décédée le 19 novembre 2019, sans que, sauf erreur, aucun quotidien ni aucun hebdomadaire de grande diffusion ne juge bon de consacrer une ligne à la disparition de 5-25 d o s s i e r 2 Cet ouvrage a été réédité en 2010 aux PUF, avec une préface de Bernard Lahire. 3 Dans un entretien donné à la revue Travail, genre et sociétés, elle dit s'être convertie au catholicisme en terminale, mais ne l'être restée que sept ou huit ans, et avoir épousé un catholique qui a, lui aussi, cessé de l'être. 4 L'épouse de celui-ci, Yvonne Halbwachs-fille de Victor Basch, co-fondateur puis Président de la Ligue des Droits de l'homme, assassiné par la Milice en 1944-assurera le secrétariat général du Centre d'études sociologiques jusqu'à son départ à la retraite au tout début des années 1950 (cf. Tréanton, 1991).