La lune de mielLa reprogrammation cellulaire méta-morphose in vitro des cellules adultes en cellules similaires aux cellules souches embryonnaires, appelées cellules souches pluripotentes induites (iPS) [1]. Cette transformation est accomplie par l'expression forcée et transitoire de quatre facteurs de transcription (OCT4, SOX2, KLF4 et CMYC) qui vont provoquer un profond remaniement de l'organisation de la chromatine et du programme d'expression génique. La découverte des iPS a profondément bouleversé le champ de la plasticité cellulaire. De très nombreuses applications des iPS ont été proposées, aux enjeux médicaux et scientifiques majeurs. On peut classer ces applications en quatre catégories : (1) une modéli-sation du développement humain dès le stade embryonnaire ; (2) une modélisa-tion in vitro des maladies génétiques ; (3) une source de cellules proches des cellules primaires humaines, normales et pathologiques, pour le criblage de nouveaux médicaments ; (4) une source de cellules autologues et « rajeunies » pour une médecine régénératrice (➜) [15]. La démonstration in vitro ou in vivo chez l'animal de la faisabilité de tous ces concepts a fait l'objet de très nombreuses publications dans les plus prestigieux journaux [2].
La défianceDepuis la description des iPS, leur identité avec les cellules souches embryonnaires (ES, embryonic stem) fait débat. Cette question est loin d'être futile : les iPS sont-elles vraiment le modèle physiologique de développement embryonnaire précoce qu'elles prétendent être ? Les iPS sont-elles des cellules normales, ou bien une aberration de laboratoire, et potentiellement dangereuses ? Il est clairement établi que les iPS sont des lignées de cellules souches pluripotentes, exprimant les marqueurs de la pluripotence et capables de se différencier en n'importe quel type cellulaire. Certes, la première version des iPS murines ne formait, après injection dans le blastocyste, que des souriceaux chimères non viables [3]. Mais une modification mineure du protocole de reprogrammation -changement du marqueur de sélection qui était alors utilisé -avait suffi pour obtenir des souriceaux viables et capables de transmettre le patrimoine génétique des iPS à la génération suivante via leurs gamètes. La question de l'identité entre ES et iPS était alors passée au second plan. Voilà six mois que le débat est revenu sur le devant de la scène, avec une très forte charge contre les iPS. De nombreux défauts leur sont reprochés. Au-delà d'une ressemblance globale avec les ES, les iPS se distingueraient sur les plans épigénétique, immunologique et généti-que. Un des premiers défauts qui avait été relevé était la difficulté à établir des souris par complémentation de blastocystes tétraploïdes, le test ultime de la pluripotence. Mais finalement ce test a pu être réalisé, démontrant qu'il était possible d'obtenir à partir d'iPS murines des souris intégralement composées de tissus issus des iPS [4,15]. Le taux de succès de ce test était plus faible que pour les ES, suggérant la présence d'anomalies é...