Mobilités et migrations dans les discours et la littérature orale moose (Burkina Faso) * Les migrations des Moose 1 du Burkina Faso vers la Côte-d'Ivoire et le Ghana, tout comme celles qui sont internes au pays, sont notoires et relativement bien connues, en particulier sur le plan quantitatif. Les discours entourant ces mobilités n'ont en revanche que peu été appréhendés. Cet article entend aborder ces paroles en se basant sur plusieurs types de discours, ayant en commun le fait d'être dits en moore, la langue des Moose, et relevant pour la plupart de la littérature orale ou de « discours de tradition orale » (Bornand 2005). Il concerne ainsi des énoncés élaborés selon une mise en forme et une esthétique langagière et artistique spécifiques, essentiellement chants et proverbes, recueillis dans des situations de performance mettant en scène un ou plusieurs énonciateurs et un public ou un auditoire auquel ils s'adressent. Les prémices des recherches actuelles sur la parole et les discours ont été posées par l'« Ethnography of Speaking and Communication » (Hymes 1962 ; Gumperz & Hymes 1964 ; Labov 1976) et ses développements français en ethnolinguistique (Calame-Griaule 1970 ; Pottier 1970). Ce courant marquait ainsi : « Sa rupture d'avec la sémantique des lexiques spécialisés [...], pour prendre en compte l'acte mis en forme dans le moment de l'énonciation, les jeux de relations entre interlocuteurs (la structure de participation selon Goffman) ou les figures de * Je tiens à remercier ici Prosper Kompaoré, directeur de l'Atelier théâtre burkinabé (ATB) à Ouagadougou et les membres de l'ATB, ainsi que Lenga Zoundi et sa troupe, et les chanteuses du quartier Yipaala de la commune de Kindi. Je remercie également Florence Boyer et Alain Sanou pour leurs relectures, ainsi que les participants du séminaire « Sciences sociales Burkina Faso (3SB) » de Ouagadougou qui ont bien voulu discuter cet article. 1. Moose correspond à l'appellation « Mossi » transcrite en moore, la langue des Moose. Au singulier, Moose devient Moaaga. Les règles de transcription suivies dans cet article correspondent à celles établies à Ouagadougou par la souscommission nationale du moore (NIKIÈMA &K INDA 1997).