Chez les Songhay-Zarma du Niger 1 , la polygamie est une pratique courante. Au moment du remariage d'un homme, on observe un rituel spécifique aux mariages polygames -le marcanda -que l'époux offre à celle de ses femmes qui perd son rang de dernière épousée.Je me suis beaucoup intéressée à cette cérémonie (BORNAND 2005(BORNAND , 2010 qui est pour les femmes un moyen socialement toléré de canaliser les conflits que suscite la polygamie. Les femmes mariées s'y retrouvent après la bénédiction du mariage, pour s'affronter de manière essentiellement ludique -bien qu'il puisse y avoir des tensions -lors d'une joute verbale où les premières épousées (les « grandes épouses ») et les suivantes (les « petites épouses ») échangent des insultes ritualisées, dansent et chantent ; c'est pour elles un moyen d'exprimer leurs émotions face à une situation qui leur est imposée et sur laquelle elles n'ont pas de prise. Mais ces chants ne possèdent pas qu'une fonction cathartique ; ils expriment parfois -comme nous le verrons -une forme de contestation des normes sociales en vigueur. L'assistance féminine du marcanda permet alors aux femmes mariées d'abandonner la retenue habituelle qu'elles ont en présence des hommes. Il arrive parfois que soient invitées des chanteuses d'origine « captive » 2 . De par leur statut social, leur répertoire est beaucoup plus libéré que celui des chanteuses d'origine libre et l'on peut alors assister à un genre de chants qui évoque, de manière souvent grivoise, provocatrice et jubilatoire, ce dont on ne parle pas au quotidien : la sexualité.Pour comprendre ce genre de performance, il peut être intéressant de le situer dans un ensemble de pratiques mobilisant l'insulte et l'obscénité. C'est le cas, généralement, des relations de « parenté à plaisanterie », étudiées par de nombreux africanistes (cf.
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