Cette contribution utilise le concept de capital social et la théorie de la force des liens pour comprendre dans quelle mesure le placement déséquilibre et reconfigure les liens sociaux des enfants et adolescents·es placés par les services de protection de l’enfance. Sur la base d’une analyse d’un corpus de 80 dossiers individuels issus des Offices cantonaux des mineurs entre les années 1950 et 1980, notre analyse concentre l’attention sur un type particulier de lien social, à savoir la relation entretenue par les jeunes placés avec les assistants·es sociaux chargés de leur suivi. Il ressort de notre étude que le placement déséquilibre les liens sociaux traditionnels, les parents étant remplacés dans leur rôle décisionnaire par un assistant·e social désigné comme gardien, tuteur ou surveillant. Les moyens humains et matériels limités mis à disposition des services de protection de l’enfance empêchent l’assistant·e social de développer une relation de confiance avec ses protégés·es. Face à cette situation, les jeunes concernés ne restent pas inactifs : ils réagissent et développent différentes stratégies d’autonomisation de soi.