Avec les objectifs de développement durable et les critiques liées à la dénaturation des paysages, l’urbanisation est de plus en plus questionnée dans sa capacité à penser son rapport à la nature en tant que support écologique et d’amélioration de la qualité urbaine et du bien être. Elle est aussi interrogée dans son rapport au paysage dans la mesure où il participe à notre perception et représentation personnelle et commune du cadre urbain. Notre hypothèse est que le paysage sensible, c’est-à-dire tenant compte des sensations, affects, émotions et imaginaires, est une composante clé de la qualité des futurs quartiers aménagés. Mais comment définir un sentiment de paysage et le traduire dans un projet urbain ? Peut-il permettre une évolution urbaine plus respectueuse du rapport sensible que les hommes entretiennent avec les lieux et leurs paysages ? Pour aborder ces questions, nous proposons de nous appuyer sur deux recherches menées successivement, L’enjeu du paysage commun (2012-2014) et Fabrique ACTive du paysage (2015-2017) qui s’interrogent sur ce qui suscite les sentiments de paysage et sur les fondements d’une intervention urbaine sensible dans un territoire ordinaire de Seine-Saint-Denis, L’Ile-Saint-Denis. Cette recherche montre que le sentiment de nature et de paysage urbain sont interdépendants, les citadins pouvant éprouver un paysage quand les espaces aménagés sont mis en perspective par des horizons de nature. Elle révèle aussi que les expériences sensibles fondent notre appréhension des lieux et appellent la mise au point de méthode de recueil du senti et ressenti urbain, mais aussi de signes du sensible dans les lieux eux-mêmes (symboles, traces, prises sensorielles et affectives). Elle montre enfin l’importance du mouvement pour éprouver avec ses sens le paysage urbain.