Cet article propose une analytique foucaldienne du dispositif pénal contemporain et de l’objectif de réinsertion. Réinsérer le condamné consiste à dépasser la forme disciplinaire du pouvoir de punir. D’une part, la critique de la discipline, critique politique, théorique et sociologique, est déjà engagée dans la légitimation d’un nouveau dispositif pénal de réinsertion. D’autre part, la mise en place effective et la réalité pratique de la politique de réinsertion consistent en la promotion des peines alternatives à la prison, évitant ainsi l’archétype disciplinaire. Il serait trop simple de considérer notre époque comme celle d’une pénalité univoque de réhabilitation, l’accroissement du nombre de détenus et le durcissement sécuritaire des lois pénales le rappellent constamment. Il faut différencier la discipline telle que Foucault la caractérisait et les techniques sécuritaires du champ pénal. L’enjeu sécuritaire et l’enjeu de réinsertion semblent faire bloc contre la discipline, du moins s’en distinguent, formant ensemble un dispositif logique et cohérent de traitement de l’illégalisme contemporain. Lié à la gouvernementalité néolibérale dont Foucault avait perçu l’avènement, ce dispositif pénal trouve une fonction positive fondamentale de formation d’un sujet adéquat à notre système économique. La réinsertion consiste en la production d’un certain type de liberté qui brouille la distinction classique foucaldienne entre assujettissement et subjectivation. Ce texte caractérise le dispositif de contrôle général dans lequel s’inscrit la réinsertion des condamnés, pour n’en faire ni l’apologie ni le blâme, mais pour en ressaisir la logique gouvernementale à l’œuvre et en préciser les enjeux.