Le Moyen-Orient, de par sa proximité avec l'Europe et sa richesse en matières premières, fait partie de la périphérie utile des puissances occidentales 1. Leur domination financière, politique et culturelle y est ressentie comme une menace identitaire par les populations musulmanes, et particulièrement arabes, ce qui a facilité l'adoption d'un vocabulaire religieux par nombre de mouvements contestataires 2. Or, depuis la fin de l'URSS, l'hégémonie américaine est devenue sans partage, comme l'a montré la guerre du Golfe, l'embargo contre l'Irak et l'évolution du conflit israélo-palestinien. Le début des attaques contre les Etats-Unis date précisément de la guerre du Golfe avec la radicalisation d'une partie des mouvements islamistes qui mettent fin à leur l'alliance avec la monarchie saoudienne et dénoncent la présence militaire américaine, devenue permanente, sur la terre sainte de l'islam. L'innovation stratégique de ben Laden 3 , dont on doute qu'elle se perde avec la mort de ce dernier ou même avec le démantèlement d'al-Qaida, est de frapper directement les Etats-Unis, y compris sur son propre sol, plutôt que ses alliés-qui ont parfois une attitude ambiguë comme l'Arabie saoudite. Devant la contestation particulièrement cruelle et spectaculaire de leur hégémonie que représentent les attentats du 11 septembre 2001, les Etats-Unis ont réagi par l'affirmation d'une véritable « doctrine de la souveraineté limitée », d'où l'intervention en Afghanistan et les menaces contre d'autres pays du Moyen-Orient (Yémen, Soudan, Irak). La guerre d'Afghanistan, premier conflit de ce type, a un caractère atypique du fait de l'affrontement de trois acteurs de statut différent : un Etat (les Etats-Unis), un quasi-Etat non reconnu internationalement (les Taleban) et un mouvement transnational (al-Qaida).