Le paradigme de la restauration occupe une place importante au sein de la gestion actuelle de l’eau et des milieux aquatiques. Depuis son apparition dans les sphères scientifiques et opérationnelles à la fin des années 1970, le paradigme s’est complexifié et les significations associées aux différents concepts de restauration, renaturation et réhabilitation ont également évolué sans que les définitions et les pratiques auxquelles ils renvoient soient toujours clairement établies. Si l’intérêt pour la restauration n’a pas fléchi, ses définitions sont encore aujourd’hui au cœur de nombreux débats sur les objectifs et les moyens de l’action. L’étude rétrospective des politiques d’intervention des Agences de l’eau Loire-Bretagne, Rhin-Meuse et Rhône-Méditerranée-Corse, offre un éclairage géographique et historique nouveau sur les définitions et les pratiques de la restauration de cours d’eau au sein de l’action publique. Elle s’appuie sur une analyse qualitative des Programmes d’Intervention mis en œuvre sur ces trois bassins (1964-2018), laquelle est complétée par une analyse de contenu quantitative des dossiers d’aides financières accordées par ces mêmes AE pour la réalisation des actions de restauration (1997-2011). Les résultats montrent une tension récurrente entre deux conceptions de la restauration, l’une hydraulique et l’autre écologique, que ne sauraient masquer la diversification des pratiques et les processus d’hybridation. A la veille d’une mise en œuvre de la compétence GEMAPI, l’analyse proposée des politiques d’intervention des AE peut apporter au débat actuel quant à la forme et aux moyens d’une éventuelle « montée en puissance » des projets de restauration de cours d’eau au sein de l’action publique.