Les femmes âgées immigrées souffrent d’une invisibilité sociale, dont témoignent la rareté des études qui leur sont consacrées. Leurs situations, bien que diversifiées selon les pays d’origine et les profils migratoires, présentent des traits communs spécifiques. Arrivées souvent dans le cadre du regroupement familial, elles se situent majoritairement à la marge du monde du travail, par la faiblesse de leur professionnalisation, de leur niveau d’éducation ou de qualification. Les difficultés matérielles qui en résultent au moment de la retraite sont aggravées dans le cas defemmes divorcées, veuves ou célibataires, qui composent plus du quart des 45-70 ans. Elles sont analysées dans cet article à partir des données d’une enquête nationale réalisée en 2003 sur l’ensemble du territoire français métropolitain, auprès d’un échantillon de 6211 personnes nées étrangères à l’étranger et âgées de 45 à 70 ans. Les résultats mettent en évidence la vulnérabilité d’une partie importante de la population féminine immigrée. Et pourtant, malgré des conditions peu favorables à leur participation au marché du travail, malgré l’obstacle de la langue, pour un certain nombre, les femmes interrogées dressent dans l’ensemble un bilan mitigé mais plutôt positif de leur expérience migratoire et de leur réussite sociale. Elles témoignent même d’une intégration à la société française un peu meilleure que leurs homologues masculins. Deux hypothèses sont proposées pour expliquer ce paradoxe apparent. En premier lieu, beaucoup de ces femmes ont connu en France, comparées à leurs concitoyennes restées aux pays d’origine, une amélioration de leur statut et une forme d’émancipation. Deuxièmement, l’investissement des femmes sur la réussite sociale des enfants peut être de nature à compenser, à leurs yeux, leur faible réalisation professionnelle propre. Il reste que la population féminine immigrée rencontre des difficultés qui risquent de s’aggraver à mesure de son vieillissement et ne sauraient être ignorées des politiques publiques.