Où est le paysage dans la ville, quand le paysage est partout ? Qu’est-ce qui fait paysage quand des « hommes sans qualités » – au sens de Robert Musil – se retrouvent projetés dans une ville inconnue (Saint-Pétersbourg) ? Qu’est-ce qui fait paysage quand un géographe (Laurent Matthey) et un économiste (Christophe Mager) se posent la question au gré de leurs pratiques de ville, toujours un peu imprégnées d’un savoir disciplinaire ? Ces questions qui relèvent de l’ontologie (de quoi parle le paysage ?), de l’épistémologie (comment penser le paysage ?) et de la politique (que fait-on collectivement quand on produit de la valeur paysagère). Nous avons néanmoins cherché à y répondre pratiquement : 1) en recourant à un principe méthodologique qui tient tout autant du transect paysager (il s’agissait de traverser la ville) que de la dérive situationniste (il s’agissait de traverser la ville dans tous les sens), 2) en usant d’une médiation technique (un téléphone portable dit intelligent) susceptible d’introduire un double effet de cadrage et de mise à distance et, 3) en définissant quelques contraintes formelles élémentaires (un dialogue réflexif et critique ancré dans des savoirs disciplinaires et des sensibilités distincts ; un jeu de rôle puisque le géographe radicalisera le côté impressionniste de ses notations, tandis que l’économiste accentuera l’appréhension de la réalité au travers de catégories aprioriques).