Depuis la fin des années 1980, la province de Québec est le théâtre d’une véritable prolifération de statuts de protection écologique sur terres privées. Réserves naturelles en milieu privé, dons écologiques, servitudes de conservation et « fiducies foncières » se multiplient maintenant dans certaines régions du Québec méridional. Vu la nature privée des transactions foncières qui composent ce mouvement, ce dernier demeure largement méconnu. Il a pourtant eu un impact substantiel sur le façonnement de certaines politiques contemporaines concernant la conservation du patrimoine naturel au Québec. À travers une recherche détaillée de fonds d’archives ministériels et une série d’entrevues avec des acteurs clefs, cet article retrace la genèse de ce mouvement de conservation volontaire au Québec. Il souligne comment les États canadien et québécois, de même que certaines corporations à but non lucratif, ont facilité la mise en place d’un réseau d’aires protégées privées largement financées par le trésor public, par l’entremise d’avantages fiscaux. La reconstruction de cette institutionnalisation de la conservation volontaire au Québec révèle comment l’État fut un agent actif dans la décentralisation, la privatisation et la fiscalisation progressive de la conservation du patrimoine écologique au Québec.Since the late 1980s, the province of Quebec has been witnessing a proliferation of ecological protection laws concerning private land. For example, the number of natural reserves on private land, ecological gifts, conservation easements and land trusts are now increasing in some areas of southern Quebec. Given that such land transactions are, by nature, private, this trend remains largely unknown. However, it has nevertheless had a substantial impact on the shaping of certain contemporary policies on natural heritage conservation in Quebec. Through a detailed search of departmental archives and a series of interviews with key actors, this article traces the genesis of the voluntary conservation movement in Quebec. It highlights how the Canadian and Quebec governments, as well as some non-profit corporations, facilitated the establishment of a network of private protected areas, yet that these are, through tax benefits, largely funded by the public treasury. The analysis of this institutionalization of voluntary conservation in Quebec reveals how the government has been an active agent in the decentralization, privatization and progressive taxation of ecological heritage conservation in Quebec