Métrique arabe : au-delà du cercle vicieux des théories
Bruno PaoliRésumé : Les recherches sur la métrique de la poésie arabe se sont longtemps bornées à réinterpréter la théorie classique d'al-Ḫalīl dans des cadres variés, de sorte qu'elle ne fut jamais soumise à une critique sérieuse et approfondie. En dépit de son indéniable attrait formel, cette théorie ne rend pourtant pas compte adéquatement de la réalité qu'elle est censée décrire, autrement dit la pratique des poètes arabes, que seule une analyse de corpus peut nous permettre de reconstituer fidèlement. Cette analyse, appliquée à la poésie des v e , vi e et vii e siècles de l'ère chrétienne, a permis d'établir un répertoire des modèles de vers employés et d'en dégager un certain nombre de principes régissant leur organisation interne. Il semblerait, jusqu'à preuve du contraire, que les poètes des siècles suivants n'aient pas dérogé à ces principes. Cet article a pour but de délimiter les quatre niveaux de l'analyse métrique, externe, interne, historique et comparée, et d'en définir les modalités. C'est sur la description complète et détaillée des pratiques métriques, externe et interne, synchronique et diachronique, que doivent se baser d'éventuelles interprétations et modélisations théoriques ; et c'est sur la base de cette description que doivent être entreprises des recherches comparées avec les autres versifications pratiquées dans la région.