Au-delà de la ¡ Revolución ! Un regard critique sur le Venezuela contemporain Julien Rebotier « Les conquistadors exigeaient que l'Amérique soit ce qu'elle n'était pas. Ils ne voyaient pas ce qu'ils voyaient, mais ce qu'ils voulaient voir : la fontaine de jouvence, la cité d'or, le royaume des émeraudes, le pays de la cannelle » Eduardo Galeano (Brecha, nº1037, 07 octobre 2005) « S'il est un danger pour la démocratie latinoaméricaine, il vient du néolibéralisme, pas du populisme » Ernesto Laclau (Nueva Sociedad, nº205, août 2006) Le président Chávez entre au Venezuela dans sa dixième année de pouvoir. Les élections présidentielles de décembre 2006 l'ont reconduit à la tête du pays jusqu'en 2012. Le récent revers lors du référendum de décembre 2007 donne des accents inédits aux polémiques qui planent sur le chavisme depuis 2001. La polémique autour du président ne nous apprend que peu de choses sur un pays qui fait irruption sur la scène et dans l'actualité internationale au tournant du XXI e siècle, émergeant, depuis la France au moins, d'une gentille indifférence ou d'un imaginaire calqué sur les images de telenovelas. La « révolution bolivarienne » s'inscrit pourtant dans la trajectoire séculaire d'un Etat bâti autour de la ressource énergétique. Les changements politiques tant débattus de la fin des années 1990 ne se comprennent pas sans une mise en perspective en trois temps. Une temporalité longue, d'abord, pour recadrer la genèse du Pétro-Etat. Une temporalité plus courte : celle de la crise des années 1980 et de la faillite de l'élite politique traditionnelle à répondre aux besoins fondamentaux de la population. Une analyse de l'immédiat, enfin, des principaux défis auxquels est confronté le processus bolivarien. Le discours dominant sur la trajectoire du pays au XX e siècle évoque une période faste de la démocratie après une parenthèse autoritaire entre 1948 et 1958. Une lecture concurrente consiste à reconnaître les structures socio politiques d'un Pétro-Etat qui