En raison de la part significative qu'ont prise les voyageurs canadiensfrançais à ces métissages et à l'émergence des Métis dans le Nord-Ouest, on sera peu surpris qu'un lien particulier se soit tissé entre les deux groupes. L'objectif de ce texte est d'examiner l'évolution de l'historiographie relativement à ce lien. S'il est clair que les Métis sont considérés comme faisant partie de la grande famille canadienne-française à la fin du XIX e siècle, la suite sera cependant l'histoire d'un graduel divorce entre les deux groupes, si bien qu'aujourd'hui, l'image résiduelle du lien entre Métis et Canadiens français -ou plutôt « Franco-canadiens » -semble bien ténue.* Cet article scientifique a été évalué par deux experts anonymes externes, que le Comité de rédaction tient à remercier. Le Métis : membre à part entière de la grande famille canadienne-françaiseLes dernières décennies du XIX e siècle marquent le moment où le regard historien se penche le plus constamment sur le rôle des Métis dans l'ensemble canadien-français, une tendance qui s'étiolera graduellement au cours de la première moitié du siècle suivant. Ce qui n'est pas vraiment une surprise compte tenu du contexte. En effet, la Confédération canadienne en est à ses tout débuts, lesquels sont marqués par le difficile amé-nagement des différences « raciales » (que l'on qualifierait aujourd'hui d'« ethniques », de « religieuses » et de « linguistiques »). Les événements qui se précipitent dans l'Ouest entre 1869 et 1885 -la cession officielle de la Terre de Rupert au Canada, le soulèvement métis à la Rivière-Rouge, la création du Manitoba, l'accélération de la marche colonisatrice, le soulève-ment du Nord-Ouest et la pendaison de Louis Riel -ne feront qu'alimenter les dissensions (et tensions) raciales en sein même de la Confédération.