Résumé
En Afrique, les droits des adolescentes et des jeunes femmes en matière de santé sexuelle et reproductive sont fortement influencés par les normes sociales. Cet article se penche sur le rôle crucial que jouent ces normes dans les décisions et les parcours d’avortement des jeunes femmes âgées de 15 à 24 ans au Bénin. Une approche ethnographique a été adoptée pour la collecte des données auprès des jeunes femmes ayant eu recours à l’avortement, de leurs proches, ainsi que d’autres membres de la communauté.
Les résultats révèlent que ces jeunes femmes se retrouvent confrontées à une triple charge normative dans leur environnement social. Elles doivent jongler avec des normes contradictoires qui stigmatisent à la fois les grossesses précoces, entravent une éducation sexuelle adéquate, et condamnent fermement l’avortement. Ces pressions normatives sont souvent le moteur de leur recours à des avortements, généralement effectués dans des conditions précaires. L’étude met également en évidence le rôle majeur des parents dans les décisions et les démarches d’avortement des adolescentes de moins de 20 ans. Lorsque les hommes sont impliqués dans la recherche de soins pour l’avortement, les adolescentes et les jeunes femmes ont généralement accès à des procédures sécurisées. Cependant, leur accès aux soins de suivi et à la contraception après un avortement est entravé par les normes sociales des professionnels de la santé.
En plus de l’élargissement des conditions d’accès à l’avortement au Bénin en octobre 2021, il est impératif de mettre en œuvre des interventions axées sur la clarification des valeurs, la sensibilisation aux droits des adolescentes, la lutte contre les violences obstétricales et la stigmatisation sociale. Ces mesures sont essentielles pour alléger le poids des normes sociales qui pèsent sur ces jeunes femmes.