Dans les fameuses « danses macabres » de la fin du Moyen Âge, la Grande faucheuse se tourne vers tous les sexes, tous les âges et, surtout, toutes les classes sociales -l'évêque, lui-même, n'étant pas épargné. L'ouvrage devenu classique de l'archéozoologue et médiéviste Frédérique Audoin-Rouzeau [2003] -également connue, sur la scène littéraire, sous le pseudonyme de Fred Vargas -met cependant en avant l'existence de différenciations sociales et même socioprofessionnelles dans la mortalité liée aux épidémies de peste, au point que celle-ci peut, selon sa démonstration, être tenue pour un véritable marqueur social. Semblable remise en cause d'un grand écart entre les représentations sociales des fléaux environnementaux et leur sociologie est précisément au coeur d'un très court ouvrage dirigé par Catherine Larrère, professeure émérite de l'université Paris-I et philosophe reconnue pour ses travaux sur les pensées de l'environnement [1997a, 1997b]. Sobrement intitulé Les Inégalités environnementales, ce petit recueil composé de quatre chapitres, publié dans la collection « La Vie des idées » (édition enrichie d'articles de la revue numérique éponyme), propose en effet une mise au point utile et éclairante sur un champ de recherche en plein essor en Amérique du Nord, qui tarde encore, cependant, à se développer en Europe et, plus spécifiquement, en France.L'ouvrage part ainsi du constat, établi par Catherine Larrère, selon lequel les pensées de l'environnement sont souvent tentées de mettre l' « accent sur les effets égalitaires des dégradations de l'environnement » (p. 5), en postulant que la finitude écologique terrestre engendre mécaniquement une « communauté de destin » (p. 6), nécessitant une prise de conscience universelle (on pense, par exemple, à la question du réchauffement climatique). L' « absence