Si la théorie informe (met en forme), la fiction performe (produit des effets dans le réel par l'effectuation de la forme). » F. Ost (2010 : 21) 1 Si à la fin du siècle dernier et dans son article intitulé La traduction et ses discours, Berman soulignait, entre autres tâches d'une traductologie à venir, la nécessité de se pencher sur le traducteur, « grand oublié de tous les discours sur la traduction » (1989 : 677), avec pour programme de retracer des parcours biographiques de traducteurs célèbres, des « destins-de traduction » mettant en lumière le rapport des traducteurs aux langues, à l'écriture et aux textes, il complétait cette « analytique du traducteur » d'un pan alors quasiment méconnu de la traductologie, celui qui étudie « comment apparaissent dans la littérature le traducteur et la traduction » (ibid.), estimant au passage qu'ils y apparaissaient peu mais de façon significative. La situation a beaucoup évolué et tout autre semble être aujourd'hui la situation puisque, a contrario, certains auteurs vont jusqu'à déplorer, non sans défaitisme, l'omniprésence de la figure romanesque du traducteur ou de l'interprète et l'abondance d'oeuvres le mettant en scène, tant au cinéma que dans la littérature et l'usage parfois outrancier qui en est fait en traductologie : « Qu'ajouter sur les traducteurs ou interprètes qui n'ait déjà été dit dans l'avalanche de romans à leur sujet 1 ? » (Ben Ari, 2014 : 114).