Les XIV e et XV e siècles sont souvent présentés comme un âge sombre, une période de crise marquée par les épidémies, les famines et la guerre. Mais on peut aussi les considérer comme une étape importante dans la construction de l'État moderne, marquée par l'affirmation croissante de l'autorité royale 1 . L'histoire de Toulouse s'inscrit dans ce schéma : la ville connaît de nombreuses périodes de disettes, voire de famines, entre 1305 et 1505les plus graves étant celles survenant en 1374-1376 et en 1456-1458ainsi que plusieurs vagues d'épidémieen particulier en 1348 et 1361, mais aussi à diverses reprises au XV e siècle 2 .Face à ces crises, les autorités urbaines tentent de réagir en organisant le ravitaillement de la cité. Au XIV e siècle, ce sont les capitouls (ou consuls) qui dirigent la ville ; ils doivent cependant compter avec les représentants de l'autorité royale (lieutenant ou sénéchal), Toulouse ayant été rattachée au royaume de France en 1271 et ayant servi à plusieurs reprises de base arrière pendant la guerre de Cent Ans 3 . À partir de 1444, la cité devient le siège d'un Parlement dont le pouvoir ne cesse de s'accroître au détriment de celui des capitouls.Ce sont pourtant les consuls qui se chargent la plupart du temps d'assurer la protection des consommateurs dans le domaine de l'alimentation, en tant que responsables de la police économique de la ville. Les ordonnances qu'ils établissent et les statuts qu'ils octroient aux différents métiers visent à protéger les citadins des fraudes concernant la qualité, la quantité et le prix des produits. Toutefois, en cas de crise grave (disette, voire famine), les représentants du roi ou le Parlement prennent les choses en main.Il s'agira ici de présenter les mesures prises pour limiter les risques auxquels les consommateurs toulousains pouvaient être exposés dans le domaine alimentaire durant les deux derniers siècles du Moyen Âge. Une attention particulière mérite d'être portée au rôle joué par les différentes autorités, de façon à montrer leur complémentarité, mais aussi la concurrence qui les oppose de plus en plus à la fin du XV e siècle.Des sources variées peuvent être mobilisées afin de refléter la diversité des acteurs impliqués dans la protection des consommateurs toulousains : d'une part, les statuts réglementant les métiers de l'alimentation, les ordonnances municipales et les délibérations émanant de l'autorité consulaire ; de l'autre, les arrêts du Parlement de Languedoc, ainsi que les lettres et mandements du roi de France ou de ses représentants.
PROTÉGER LE CONSOMMATEUR FACE AUX RISQUESTrois défis se posent aux pouvoirs publics à la fin du Moyen Âge : garantir la qualité des produits, empêcher les fraudes sur les quantités, et éviter de fortes flambées des prix.