Résumé Les entreprises mutualistes occupent une place significative dans plusieurs secteurs économiques : assurance et prévoyance, banque, santé... Régies par des formes juridiques différentes de celles de leurs concurrents capitalistes, elles revendiquent souvent une éthique de gouvernance plus que centenaire. Malgré la diversité de leurs origines historiques et de leurs positionnements actuels, toutes ou presque font état de principes de liberté et de démocratie, de non lucrativité et de solidarité. Dans quelle mesure ces valeurs participent-elles aux pratiques de gouvernance et de management des entreprises de statut mutualiste ? S’appuyant sur certains des nombreux développements de la théorie des organisations, la présente contribution met en questions la portée et la spécificité effectives de ces principes, au-delà de leur expression courante dans la rhétorique institutionnelle ou militante. Ce faisant, elle invite chercheurs et praticiens à s’interroger sur les modes de détermination du juste dans le pilotage et le fonctionnement des organisations mutualistes, autrement dit sur les structures de justification qui légitiment l’action de leurs dirigeants.
La doctrine du New Public Management (NPM) est souvent considérée comme dominante dans l’évolution du système de santé. Acteur de l’économie sociale et solidaire (ESS) impliqué dans ce secteur, la Mutualité française affirme ses valeurs propres tout en étant confrontée aux arguments du NPM. Comment s’y déroule cette rencontre ? Une analyse longitudinale des discours produits par une union régionale de la Mutualité montre un mouvement croisé de pénétration du NPM et une instrumentalisation de l’ESS.
Les associations médico-sociales évoluent dans un contexte de concurrence régulée, lié aux réformes de l’État et accentué par les déséquilibres budgétaires. Ce régime les confronte à des injonctions ambivalentes : rivalité et coopération, partenariat public-privé et concurrence de nouveaux entrants actionnariaux. Au-delà du débat sur la marchandisation, le processus en jeu est la marchéisation de l’accès aux financements. Pour ces associations, l’adaptation stratégique n’est pas qu’une affaire de techniques gestionnaires. Elle est aussi un défi identitaire de légitimité pour leur gouvernance, leurs managers et leurs équipes. Selon leur taille, leur implantation et leur culture, les associations sont exposées à deux risques majeurs. Le premier est, pour certaines, leur disparition en tant qu’organisation autonome, par méconnaissance ou déni des changements déjà effectifs. Le second est, pour d’autres, le mimétisme managérialiste qui réduit leur vision de la performance à la seule satisfaction des financeurs publics ou, le cas échéant, privés.
La solidarité collective avec les personnes les plus âgées et les plus dépendantes constitue un défi majeur pour la société française aujourd’hui et pour les décennies à venir. Simultanément la volonté de réduire les dépenses publiques conduit les autorités à financiariser la régulation des politiques gérontologiques. Les normes de concurrence et d’efficience conditionnent désormais la pérennité des EHPAD et services de soins à domicile. Les directeurs et cadres de ces structures associatives se trouvent ainsi placés entre valeurs humanistes et conformité technocratique, animation des équipes et masse salariale bloquée, gouvernance associative et légitimité managériale... Une identité professionnelle incertaine se construit en réponse aux tensions liées en large part à la pression normative et budgétaire. Illustrée par des verbatim tirés de deux recherches-interventions, la contribution discute l’importance mais aussi la fragilité de cette construction à la lumière des analyses de Hirschman, Sainsaulieu et Dubar.
scite is a Brooklyn-based organization that helps researchers better discover and understand research articles through Smart Citations–citations that display the context of the citation and describe whether the article provides supporting or contrasting evidence. scite is used by students and researchers from around the world and is funded in part by the National Science Foundation and the National Institute on Drug Abuse of the National Institutes of Health.