La présente livraison d'Histoire Épistémologie Langage se propose de prolonger, en élargissant leur horizon, les travaux pionniers initiés par Sylvain Auroux sur la grammatisation 1 massive des langues du monde à partir de la tradition grammaticale gréco-latine (cf. Auroux 1992). La grammatisation des vernaculaires européens etaujourd'hui encorede nombreuses langues « exotiques », sur la base de la description grammaticale élaborée pour le latin (elle-même issue d'un transfert du modèle grec), constitue un facteur d'unification théorique qui n'a certes pas d'équivalent dans l'histoire des sciences du langage (Auroux 1994, p. 82). L'histoire a néanmoins connu d'autres « grammaires étendues » (cf. Auroux 1992, p. 19) : le modèle grammatical élaboré pour l'arabe a été utilisé pour décrire le copte, l'hébreu, le kurde, le persan, le syriaque, le turc ; des outils développés pour le chinois ont été étendus au coréen, au japonais et au vietnamien ; le modèle grammatical élaboré pour le grec a été utilisé pour décrire l'arménien, le géorgien, le latin, le vieux slave d'église et le syriaque ; des descriptions grammaticales élaborées pour le sanskrit ont servi à décrire plusieurs langues d'Asie (variétés d'indo-aryen moyen et moderne, langues dravidiennes, vieux javanais, cingalais), une langue de Sibérie (bouriate) et des langues parlées bien loin de l'Asie (langues algonquiennes). Ce numéro d'Histoire Épistémologie Langage porte sur ce que nous conviendrons d'appeler la Grammaire Sanskrite Étendue, c'est-à-dire la grammatisation de diverses langues sur la base de descriptions grammaticales initialement élaborées pour le sanskrit. Dans sa « Note préliminaire » à l'article d'Ojihara (1971), Colette Caillat nous rappelait l'invitation de Louis Renou « à déterminer exactement comment, et dans quelle mesure, les descriptions anciennes du sanskrit ont été imitées par les 1 Sylvain Auroux définit le concept de grammatisation comme suit (1992, p. 28) : « Par grammatisation, on doit entendre le processus qui conduit à décrire et à outiller une langue sur la base des deux technologies, qui sont encore aujourd'hui les piliers de notre savoir métalinguistique : la grammaire et le dictionnaire. »
RÉSUMÉ: Plusieurs discussions attestent le fait que les grammairiens indiens de tradition p inéenne avaient clairement identifié le phénomène autonymique. L’essentiel des réflexions menées par ces grammairiens est lié à l’interprétation du célèbre s tra p inéen I. 1.68 sva r pa abdasya-a abdasa jñ «Une expression se dénote elle-même à moins qu’elle ne soit le nom d’un terme technique linguistique», avec, comme préoccupation majeure, la résolution du problème posé par la réflexivité totale (problème du signe «qui se désigne lui-même»). Le présent article tente de donner une vue globale des différentes thèses qui ont été défendues pendant près de mille ans: des grammairiens ont recouru 1) au critère du contexte ou niveau de langage, qui oppose le mot figurant dans la règle grammaticale au mot qui est destiné à l’usage, 2) à celui de la généralité, qui oppose l’occurrence au type, 3) à celui de la totalité, qui oppose la partie au tout, ou encore 4) à celui du pouvoir du mot, qui peut être moyen de compréhension ou objet de compréhension. Par ailleurs, l’une des conséquences de la règle I. 1.68 est de soumettre les autonymes à la syntaxe usuelle. À travers plusieurs exemples, cet article donne un aperçu des effets de la nominalisation dans la grammaire de P ini.
Indian linguistic thought begins around the 8 th -6 th centuries BC with the composition of Padapāṭhas (word-for-word recitation of Vedic texts where phonological rules are not applied). It took various forms over these twenty-six centuries and involved different languages (Ancient, Middle and Modern Indo-Aryan as well as Dravidian languages). The greater part of documented thought is related to Sanskrit (Ancient Indo-Aryan). Very early, the oral transmission of sacred texts-the Vedas, composed in Vedic Sanskrit-made it necessary to develop techniques based on a subtle analysis of language. The Vedas also-but presumably later-gave birth to bodies of knowledge dealing with language, which are traditionally called Vedāṅgas: phonetics (śikṣā), metrics (chandas), grammar (vyākaraṇa) and semantic explanation (nirvacana, nirukta). Later on, Vedic exegesis (mīmāṃsā), new dialectics (navya-nyāya), lexicography (nighaṇṭu and later, kośa) as well as poetics (alaṃkāra) also contributed to linguistic thought. Though languages other than Sanskrit were described in premodern India, the grammatical description of Sanskrit-given in Sanskrit-dominated and influenced them more or less strongly. Sanskrit grammar (vyākaraṇa) has a long history marked by several major steps (Padapāṭha versions of Vedic texts, Aṣṭādhyāyī of Pāṇini, Mahābhāṣya of Patañjali, Bhartṛhari's works, Siddhāntakaumudī of Bhaṭṭoji Dīkṣita, Nāgeśa's works) and the main topics it addresses (minimal meaning-bearer units, classes of words, relation between word and meaning/referent, the primary meaning/referent of nouns) are still central issues for contemporary Linguistics.
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