Entre histoire des politiques sociales et familiales et histoire de la protection maternelle et infantile, cette étude de cas engage une réflexion empirique sur le travail de normalisation de l’activité reproductrice et plus largement sur le gouvernement des mœurs dans un contexte d’État social en construction et de médicalisation de la société. L’ambivalence d’un dispositif sanitaire visant autant à « protéger » la mère et l’enfant (ou le futur enfant) qu’à régler les comportements et à instaurer une vigilance administrative sur des catégories particulières est interrogée. Ce faisant, l’analyse tend à se déprendre de toute vision caricaturale. D’une part, elle suggère combien contrôle et consentement peuvent aller de pair lorsque les intérêts se rejoignent ; d’autre part, elle met l’accent sur les limites de l’emprise institutionnelle sur les populations. Les litiges en matière d’allocations prénatales permettent en effet de faire émerger de l’information historique. Des technologies de vigilance et de détection encore rudimentaires, les carences du maillage médico-social, la pluralité des intervenants se combinent à des difficultés proprement physiologiques pour faire de la surveillance prénatale une activité au moins partiellement aléatoire.
Though resulting from a long-term process, the need to manage pregnancies both medically and bureaucratically became a state concern, especially from the 1920s onwards. A woman’s official obligation to notify the state of her pregnancy (and therefore to know it on time) goes beyond a matter of biopolicies and poses a range of contradictions. ‘Pregnant or not?’ – as an issue of knowledge – is a powerful tool for apprehending the tensions between individual freedom, privacy, institutional requirements and professional powers.In order to better understand the historical meaning of pregnancy diagnostics in mid-twentieth-century France, this paper combines three dimensions: uncertainty and its management; the informational asymmetry between institutional agents and women; and the diachronic dimension of gestation. Writing this history sheds more light on an apparent paradox: while knowing and notifying one’s own pregnancy became a duty, the tools that could help women eliminate some doubt right from the first months of their pregnancy – in particular the innovation of laboratory diagnosis – was seen as a danger. When, in 1938, private laboratories began publishing advertisements for the laboratory test in the most widely-read newspapers, tending to reframe it as a commercial service, the anti-abortion crusade was increasing its propaganda and its political pressure. This crusade’s legal victory proved incomplete, but for a long time some of the most conservative physicians recommended great parsimony in prescribing testing. Combined with reducing the legal time limit for notification, this conflict shows how the state injunctions towards women could look like a ‘double bind’.
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Résumé En nombre d’affaires, l’apogée de la répression de l’avortement se situe à la Libération et non sous le régime de Vichy. Plusieurs voies explicatives sont dégagées pour rendre compte de cette donnée contre-intuitive. Tout d’abord, la volonté, manifestée par l’administration centrale de la Famille et les natalistes, de proroger l’action répressive menée sous l’Occupation. Ensuite, la progressive spécialisation des méthodes policières dans ce type d’affaires, qui porte particulièrement ses fruits entre 1944 et 1946. Enfin, il s’agit d’explorer le maintien, au sortir de la guerre, de pratiques délatrices répandues sous Vichy et relancées dans le contexte de l’épuration sauvage. Celles-ci restent à l’origine de la majorité des dossiers à la Libération. On explique leur importance en montrant combien elles sont encouragées par certains services de police qui œuvrent de concert avec des magistrats et des médecins farouchement impliquées dans la lutte contre l’avortement.
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