sont conjugués pour placer entre les mains du pilote d'un appareil de programmation scientifique et « biopolitique » unique en son genre, l'Inra, parvenu à pleine maturité, le pouvoir de dessiner pour plusieurs décennies la contribution de la recherche à l'orientation du modèle agricole national. Alors, oui, comprendre les conditions de l'ascension de Jacques Poly dans l'appareil de direction de la recherche, restituer la culture et la vision scientifiques du généticien, reconstituer le réseau de contacts et les affinités créés par le passage de l'intéressé dans deux cabinets ministériels au cours des années 1960, s'avèrent une démarche tout à fait pertinente pour comprendre les intentionnalités et le potentiel mobilisateur du rapport de 1978, et pour éclairer le paradoxe de sa mise en sommeil temporaire alors même que son auteur atteignait, en partie grâce à lui, les fonctions suprêmes au sein de l'institut. Présent à la manière d'une statue du commandeur dans les souvenirs de la plupart des acteurs internes et externes de la recherche agronomique des années 1970 et 1980, figure tutélaire omniprésente dans les témoignages recueillis depuis vingt ans par la mission Archorales de l'Inra, Jacques Poly demeure malgré tout une figure énigmatique, dont on sait peu de choses en dehors d'évocations de son « personnage » et de son « verbe » hauts en couleur. Il n'a finalement laissé que peu d'écrits, et des écrits fort peu bavards sur lui-même et sur les conditions de production de ses décisions stratégiques. Homme de relations directes et fondées sur la confiance, voire sur l'amitié, Jacques Poly a imposé, par-delà sa mort, un respect quasi absolu du principe de loyauté à ses anciens collaborateurs et partenaires. Non que l'historien soit particulièrement désireux d'apprendre les secrets de l'exercice du pouvoir et de la pratique de l'arbitrage des conflits internes et externes ; l'histoire de l'Inra n'a rien d'original de ce point de vue. Mais ce qui est autrement intéressant que les jeux d'influence, c'est la maturation des représentations, des convictions, des orientations de la recherche scientifique ; c'est, tout simplement, la fabrique collective, mais exprimée depuis la « tête » dans un organisme fortement hiérarchisé, de la proposition de contribution de la recherche agronomique publique à ce que, dans les années 1970 et 1980, l'on appelle encore le « progrès » de la société et de l'État pour lesquels celle-ci travaille. Au sein de l'Inra, le Comité d'histoire, créé en 2005, développe une réflexion méthodique et croisée sur le passé proche des sciences agronomiques et de leurs relations avec le pouvoir et avec la société. Son président, Egizio Valceschini, atteste par sa trajectoire scientifique même, de l'analyse économique à la recherche historique, la force d'attraction du partage de l'histoire entre chercheurs et acteurs. Le Laboratoire d'études rurales de Lyon, ensuite, par la présence de Pierre Cornu, professeur d'histoire contemporaine et d'histoire des sciences, témoigne de l'intérêt croissant des histor...
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