On étudie généralement les grèves en tant que phénomènes se rattachant au système des relations industrielles. N'y aurait-il pas lieu de se demander si, jusqu'à un certain point, les grèves ne seraient pas l'expression d'un état de tension sociale plus généralisé et si elles n'agiraient pas à la manière d'une soupape de sécurité.On définit généralement la grève comme un arrêt temporaire du travail par un groupe d'employés afin d'exprimer leurs griefs et de faire valoir leurs revendications. Ainsi considérée, la grève fait partie du système des relations de travail. Mais cette définition, fort valable en matière de statistiques, suffit-elle à expliquer ce phénomène à l'intérieur de la société?L'étude porte sur l'analyse des statistiques relatives aux grèves dans dix pays sur une période de dix ans: Australie, Canada, France, Grande-Bretagne, Israël, Italie, Japon, Suède, États-Unis sont identifiés comme des sociétés dans lesquelles l'agitation ouvrière est principalement due à des facteurs reliés au système des relations de travaillui-même. En d'autres pays, cependant, les conflits de travail ont tendance à être dépendants de facteurs externes. La tension sociale peut exercer une importance déterminante dans la fluctuation des grèves dans ce deuxième groupe.La tension sociale peut provenir de frictions ou de frustrations et s'extérioriser de plusieurs façons. Le concept de soupape de sécurité institutionnel exprime des tensions dans des sphères autres que celles du conflit proprement dit, la grève se présentant comme une soupape de sécurité pour relâcher des tensions qui se font sentir à l'extérieur du système des relations du travail.Selon une première hypothèse, des modifications dans le niveau de la tension hors des relations de travail se manifestent par des changements dans le nombre et l'importance des grèves. Une augmentation ou une diminution du niveau de tension sociale donnera lieu conséquemment à une augmentation ou à une diminution des grèves. En deuxième hypothèse, la grève est dépendante du niveau de tension sociale compte tenu des soupapes de sécurité qui existent dans une société donnée.La vérification de ces deux hypothèses s'est faite en deux étapes. Dans la première, qui se fonde uniquement sur les statistiques d'Israël, l'action de grève et la tension sociale furent mesurées indépendamment l'une de l'autre. La deuxième étape a consisté en une tentative pour vérifier la deuxième hypothèse fondée sur les données des neuf autres pays entre 1958 et 1967 au moyen de trois variables: la présence d'institutions agissant comme soupapes de sécurité, le degré de tension sociale et l'action de grève.Pour Israël, on a fait l'analyse de l'activité de grève, puis on s'est basé sur les thèmes des éditoriaux d'un journal populaire pour mesurer le degré de tension sociale, en retenant, en particulier, les critiques contre le gouvernement.Par cette analyse, on a découvert que les grèves deviennent plus fréquentes dans un climat de tension sociale d'où l'on peut s'attendre à ce que le nombre des grèves soit plus ...