Cet article analyse précisément les pratiques électorales de trois femmes des classes populaires racisées en 2017. Mobilisant des observations dans le quartier et des entretiens répétés avant, pendant et après la séquence électorale, l’analyse localisée au sein d’un quartier très ségrégué restitue leurs votes contrastés dans leurs conditions de production en donnant à voir le poids des appartenances de classe, de genre et des rapports sociaux de race. Bien que ces trois femmes vivant dans le même contexte résidentiel votent pour des candidats politiquement très divers (des candidats du Front national à ceux du Parti socialiste), dans les trois cas, leurs positions relatives au sein des classes populaires locales, leur condition de femmes et leurs relations intra-familiales comme leurs appartenances ethno-raciales (et religieuses) sont intriquées pour expliquer non seulement leur mobilisation électorale statistiquement improbable, mais aussi la variabilité de leurs pratiques de votes qui est tendanciellement indexée à des rapports sociaux différenciés et conflictuels au sein du quartier.
Cet article prend pour objet le débat de l’entre-deux tours de l’élection présidentielle de 2017. Il s’agit par cette étude de cas d’analyser les processus de réception de l’information politique par des publics socialement et politiquement diversifiés. L’article prend appui sur des enquêtes intensives par observations, conduites simultanément pendant le débat au sein de sept groupes contrastés. L’analyse donne à voir des processus sociaux de mise en ordre des réceptions à deux échelles articulées : d’une part, celle des interactions au sein des groupes, qui tendent à produire de l’homogénéité et à neutraliser les dissonances, d’autre part, celle de l’espace social des publics, de leurs lectures alternatives de l’émission et de leurs (non) ajustements à l’interprétation qui s’imposera dans les débats publics. La mise en relation de ces résultats montre comment l’ordre social se réfracte dans l’ordre des réceptions politiques.
Cet article contribue au renouvellement des analyses contextuelles du vote en portant la focale sur les dispositions et les intermédiations électorales dans deux quartiers, l’un populaire et l’autre gentrifié, du 18 e arrondissement de Paris à l’occasion des scrutins présidentiels et législatifs de 2017. L’analyse relationnelle des mécanismes de production des votes dans des groupes sociaux et ethno-raciaux, très inégaux et vivant à proximité, souligne l’importance des dynamiques collectives d’appartenance et des rapports sociaux de classe et de race dans la définition des préférences et affinités politiques. Dans le cas des élections nationales de 2017 au moins, davantage que les médiations instituées du champ politique, ou encore que la campagne médiatique, ce sont les groupes primaires et les affinités sociales et ethno-raciales qui fournissent des clefs d’interprétation du politique. Si bien que la principale intermédiation électorale, à la fois symbolique et pratique, passe par les manières dont les électeurs se pensent et se représentent les autres groupes sociaux, à l’articulation des formes de domination sociale, raciale et politique.
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