Expulser et menacer d’expulsion, les deux facettes d’un même gouvernement ? Les politiques de gestion de la migration irrégulière en France

Abstract

L’incorporation des logiques d’évaluation au cœur de l’État a eu pour effet de transformer en profondeur les pratiques de contrôle de l’immigration irrégulière en France, entraînant une hausse importante du nombre des interpellations et un recours plus systématique à l’enfermement. Dans le même temps, les expulsions n’ont pas significativement augmenté. Les étrangers en situation irrégulière ne sont plus expulsables par définition, ils sont désormais menacés d’expulsion. Plutôt que d’envisager l’incapacité à expulser comme un échec, cet article appréhende expulsion et menace d’expulsion comme les deux formes complémentaires d’une même gestion des flux migratoires. L’expulsion de quelques-uns s’accompagne d’un confinement de tous les autres au sein du territoire national. De part et d’autre de la frontière, il s’agit alors de contenir les « indésirables », d’entraver et de ralentir leurs déplacements.

Immigrants facing Covid 19 containment in France : An ordinary hardship of disaffiliation

“…Keeping individuals on the margins of the law and unable to act is reminiscent of, and for some, probably a continuation of, the experience of people threatened with expulsion and caught up in the wheels of deportation ( Barnier et al., 2019 ; Agier, 2011 ). Confined at the territorial level because they are prohibited from crossing the borders but without authorization to work or to renew a regularization procedure, these persons, like those who are confined, experience, when asked, a ‘ feeling of containment, the impression of being hindered in their movements ’ ( Courant, 2018 ). Containment is thus set up as the reproduction of a context of destitution and contributes to placing these people even more on the margins of society.…”

The Spatial Mobility Trap? How Urban Contexts Shape the Spatial Mobility of Male Undocumented Youths

“…Other factors may differentiate lived experiences among undocumented youths. France and the United States deport men much more than women, and so men may experience deportability in distinct ways (Golash‐Boza 2016; Le Courant 2018). In particular, deportation practices have targeted immigrants from certain places of origin, especially Mexicans and Central Americans in the United States and North Africans, West Africans, and Chinese in France.…”

Vivre en marge et en famille : la précarité résidentielle au cœur de l’expérience des familles en exil

“…Au coeur de ces logiques, les familles migrantes et plus particulièrement les femmes seules accompagnées d'enfants occupent un statut à part. Qualifiées de vulnérables par la Convention d'Istanbul (2011), elles sont donc moins directement perçues comme dangereuses (Le Courant, 2018) et moins contraintes à la clandestinité que les hommes seuls. Elles peuvent faire valoir plus facilement leurs droits à différentes formes de protection et sont donc moins soumises à la menace de la violence d'État.…”