Cet article provient d’une enquête en cours sur les réactions post-attentats de 2015 menée en région parisienne auprès d’élèves et de différents acteurs de l’institution scolaire travaillant au cabinet ministériel, à la Dgesco, dans le premier et second degré. Notre analyse se fonde sur un corpus actuel de 42 entretiens. Ces données sont articulées aux travaux sur les réactions post-attentats (Truc, 2016, 2017 et 2019 ; Bazin, 2018 ; Boussaguet et Faucher, 2017 et 2018 ; Lefébure, Roche et Sécail, 2018). De même, l’analyse de la place des émotions ne peut négliger le foisonnement d’études consacrées à l’émotion depuis une quinzaine d’années – on parle d’emotional turn – que ce soit en sciences humaines et sociales ou en neurosciences (Corbin, Courtine et Vigarello, 2016-2017 ; Traïni, 2009 ; Faure et Négrier, 2017 ; Eustache, 2016). Ces recherches permettent de situer les émotions dans des processus de constructions et d’interactions sociales dans lesquels les affects se mêlent inextricablement à des actions, notamment politiques, jugées traditionnellement rationnelles mais qui portent bien en elles une dimension émotionnelle (Deluermoz et al., 2013). Or, notre objet d’étude offre une illustration particulièrement éclairante de ces processus à l’œuvre lors des attentats de janvier et novembre 2015.