Les réunions sont essentielles pour structurer l’espace social à tel point qu’elles se sont imposées dans le paysage managérial comme lieux privilégiés de diffusion d’informations et de prise de décision. Que ce soit par tradition, par élan de management participatif ou par absence d’alternative, les réunions sont là, s’accumulant parfois jusqu’à l’excès pathologique de la « réunionite ». Alors que nombreux sont ceux qui attaquent les réunions en questionnant leur utilité ou leur efficacité, cet article vise à étudier le vécu de ces réunions par leurs participants. Souvent inévitable, du moins en partie, l’ennui est un des principaux états affectifs qui surgit dans les réunions mal gérées. Dans cet article, l’ennui est notamment envisagé du point de vue de ses conséquences potentielles, qui vont au-delà d’un simple impact sur l’efficacité de la réunion elle-même. En nous appuyant sur des entretiens avec leurs participants dans des cadres organisationnels divers, cette recherche nous permet d’avancer trois contributions. Premièrement, en identifiant les différentes conditions d’apparition de l’ennui en réunion, on développe une approche de l’ennui vécu, dépassant ainsi son caractère tabou qui reste difficile à avouer et encore plus à verbaliser. Deuxièmement, on met en lumière le caractère profondément ambivalent de l’ennui : lorsque l’ennui est ressenti pendant de longs moments, il devient néfaste et destructeur alors qu’en advenant sur de courtes périodes, l’ennui se fait moment de respiration et de créativité. Ensemble, ces deux points nous permettent troisièmement de tirer des implications managériales pour proposer un « bon usage de l’ennui » dans la conduite des réunions.