Le contexte de « Guerre froide » qui a polarisé une grande partie du monde, mais aussi chacune des sociétés nationales, pendant près de 7 décennies au 20 e siècle n’a pas épargné les activités physiques et sportives en dépit de l’aura d’apolitisme qui les entoure. En France par exemple, la lutte des classes s’est réfractée sur les terrains sportifs dès le début des années 1920 avec la création de la Fédération sportive du travail (FST), affiliée à l’Internationale rouge des sports (IRS) dont le siège était à Moscou. Son remplacement par la Fédération sportive et gymnique du travail (FSGT) en 1934 suite à la réconciliation des deux principales branches, communiste et « réformiste », du mouvement ouvrier s’est aussi traduit par la substitution du mot d’ordre de « sport rouge » par celui de « sport populaire ». L’ouverture internationale, en particulier vers les pays « frères » du Bloc de l’Est ne s’est pas perdue pour autant, et a emprunté des canaux divers : rencontres sportives ponctuelles, tournées d’athlètes et de dirigeants, correspondances à long terme, mais aussi circulation d’idées et de textes doctrinaux. A rebours d’une représentation superficielle présentant la sphère d’influence soviétique et les partis communistes nationaux en son sein comme des ensembles monolithiques et verticaux, cette contribution propose de montrer la réciprocité et la complexité des circulations humaines et idéelles dans la sphère du bloc communiste. À partir de l’analyse comparée des trajectoires biographiques d’un certain nombre de dirigeants du « sport communiste » en France à différentes périodes, nous défendons en particulier la thèse selon laquelle l’évolution des positions diplomatiques et doctrinales des organisations concernées (en particulier la FSGT et le Parti communiste français) ne découlent pas simplement de celles de Moscou, mais présente une certaine autonomie et ont même exercé réciproquement une relative influence vers l’Est. Ce faisant, à partir d’un cas particulier mais paradigmatique, ce texte suggère que les acteurs de l’internationalisation du sport ne se résument pas aux seuls dirigeants des organisations sportives internationales.