Politiques migratoires et sélectivité des migrations étudiantes en France : une approche sociodémographique

Abstract

Depuis l’annonce de la nouvelle « stratégie d’attractivité pour les étudiants internationaux », dénommée « Bienvenue en France », le thème des migrations étudiantes est revenu avec force sur le devant de la scène politique et médiatique en France. Les mesures préconisées s’inscrivent dans le prolongement d’une politique sélective de l’immigration mise en place depuis 2003. Dans cet article, nous nous proposons d’examiner la façon dont les politiques visant les étudiants étrangers depuis les années 1970 ont impacté les migrations étudiantes. Les données administratives mobilisées nous permettent de montrer que les politiques d’immigration sélectives contribuent non seulement au ralentissement des migrations étudiantes vers la France, mais ont également pour effet de reconfigurer les caractéristiques de ces migrations au détriment des étudiants les plus modestes, issus des pays à faible pouvoir d’achat, et de certaines disciplines. Une récente enquête que nous avons menée en 2016-2017 nous permet également d’anticiper le fait que la hausse drastique des frais de scolarité instaurée en 2019 pour les étudiants extracommunautaires risque d’accélérer ces dynamiques.

Ce que nous faisons, et ce que l'on nous fait. Les luttes politiques universitaires

“…C’est qu’il s’agit d’attirer les étudiant·es des pays émergents (BRIC). Toutefois, il semble pour le moins paradoxal de prétendre que le renchérissement du coût des études suffise pour les séduire, sans améliorer en contrepartie l’offre d’enseignement : cette hypothèse est d’ailleurs démentie par un ensemble de recherches qui corrèlent l’érosion de l’attractivité de la France au durcissement des politiques migratoires (Kabbanji et Toma, 2020). Pourtant, le gouvernement, soutenu par le président de la République, défend la cohérence du plan : présumé·es acquis·es aux valeurs du marché, les étudiant·es ne seraient guère séduit·es par des universités « presque gratuites » – l’expression est d’Édouard Philippe.…”

Étudiants algériens en France. Entre politiques de rejet et tentatives d’installation

“…Dans ce contexte politique de plus en plus sélectif (Kabbanji & Toma, 2020) Lors du dépôt de demande de visa, les étudiants candidats au départ ne disposant pas de bourse d'étude doivent attester de cette somme 22 , considérée comme nécessaire au financement d'une année d'étude en France (soit 615€ par mois). Au vu du différentiel de niveau de vie entre la France et l'Algérie 23 , cette étape filtre une partie importante des candidats en opérant une sélection « par l'argent ».…”

Mobilités étudiantes internationales : l’attractivité de la France

“…Cette relative perte de vitesse de la France peut s'expliquer par des politiques migratoires de plus en plus sélectives, introduites depuis 2005 10 . Elle pourrait aussi être liée au développement de l'enseignement supérieur transnational privé dans le monde, qui a permis l'émergence de nouveaux pôles d'attraction comme la Turquie, devenue l'un des dix principaux pays récepteurs de mobilité étudiante avec des taux de croissance importants.…”