Cet article interroge les usages de la variable « sexe » et du concept de « genre » dans le champ de la sociologie de l'éducation et de la formation. L'analyse couvre la période qui s'étend depuis les années soixante jusqu'à nos jours et se centre sur les analyses des inégalités d'éducation et de formation. À partir des années soixante et soixante-dix, la question des inégalités est centrale dans les travaux des sociologues de l'éducation, qu'il s'agisse de l'accès des élèves et des étudiants aux filières du système d'enseignement, ou de leurs performances, scolaires et universitaires (Cacouault & Oeuvrard, 1995). Bourdieu et Passeron (Les héritiers, 1964), Baudelot et Establet (L'école capitaliste en France, 1971) ou Boudon, qui publie L'inégalité des chances en 1973, mettent d'abord l'accent sur les déterminations liées à la différence de classe, quels que soient leurs désaccords, mais ils n'ignorent pas complètement la « différence de sexe ». En effet, au cours de la période évoquée plus haut, les filles rattrapent, puis dépassent les garçons du point de vue de la fréquentation du secondaire et de l'université. En même temps, il existe des disparités importantes quant aux choix d'orientation : les hommes restent majoritaires dans les études scientifiques, les femmes dans les formations littéraires. Nous nous proposons, dans la première partie de cet article, d'interroger de manière systématique la part réservée au « sexe » et aux « rapports de sexe » dans les travaux cités, dont les failles ont commencé à être dévoilées au cours de la période post-68 (Kandel, 1974) et qui ont fait l'objet de critiques au fil des décennies ultérieures (