Depuis une dizaine d’années, les séries télévisées de provenance américaine sont devenues l’objet déclaré de passion de la part de catégories peu enclines jusque-là à valoriser ce genre télévisé tout autant qu’un format de premier plan dans la programmation de soirée des grandes télévisions en France. Consommées dans un contexte technologique transformé par les supports DVD et internet, les séries télévisées saisonnières ou unitaires renouvellent le mode cultivé dominant de consommation des pratiques culturelles, de nature ascétique, en même temps que les significations sociales attachées aux oeuvres culturelles. À partir d’entretiens avec des amateurs, formant corpus dont le noyau dur est constitué d’une population de jeunes adultes, cet article rend compte d’une pratique culturelle qui articule un genre et ses hiérarchies internes à une consommation dans l’espace domestique, selon un temps décalé et dédié, et fréquemment solitaire, avec un système de valeurs et de significations contrastant avec la traditionnelle cinéphilie. La consommation des séries peut se décrire comme un régime de valeur culturel, défini ainsi parce qu’il articule un genre esthétique et un système de valeurs pour une population. Cette configuration n’est pas sans mettre à l’épreuve le modèle de l’oeuvre cinématographique, consommée en salle, et marquée en France du sceau de « l’auteur ». Aussi l’attitude amateur face aux séries télévisées est-elle un excellent révélateur des transformations en cours concernant les pratiques médiatiques et culturelles portant sur des biens issus des industries culturelles et directement articulées à l’environnement numérique.For ten years, television series, and especially those produced in the US, have become an addictive and passionate cultural object for many people, previously less inclined to watch this television genre, as well as a main program on prime time French television. Watched in a new environment, transformed by DVDs and the Internet, seasonal and stand alone series have renewed the dominant highbrow and ascetic regime and social meanings attached to cultural goods. Based on qualitative interviews with young adults, this article attempts to demonstrate the development of a new cultural practice, articulating a new genre (‘Quality Television’ as identified by American and British scholars), and its internal hierarchy, with a consumption in domestic space. The viewer, who is frequently alone, chooses and organizes his watching time according to a value system and meanings contrasting the manners of consumption of the “cinéphilie” and movie theater goer. We argue that watching series could be interpreted as a specific and new “regime of cultural value” for this audience. This regime of cultural value is no longer ascetic but situated (valorizing pleasure in the here and now), no longer imposed but chosen, no longer shameful but positive. Fan attitudes towards this genre is an excellent gage of the current transformation of media and cultural practices provoked by the digital environment.Desde h...