Cet article retrace les fils de l’amitié intellectuelle entre Marcel Trudel et Guy Frégault, deux historiens majeurs du renouveau historiographique québécois d’après-guerre. Son but particulier consiste à montrer en quoi cette amitié, notamment mise en évidence dans leurs correspondances personnelles et certaines collaborations, a été scellée autour d’une puissante prise de conscience générationnelle et à travers l’adhésion à une même configuration historiographique, celle de l’« histoire critique », dont ils se sont tous deux fait les ardents promoteurs au cours des décennies 1940 et 1950. En explicitant les ressorts et les déterminants de cette relation d’amitié, l’analyse met à l’épreuve le schéma d’explication – commode, mais forcément réducteur – offert par la querelle des écoles historiques entre Montréal et Québec. De même, elle permet de jauger autrement la complexité des aspirations et des attentes spécifiques qui se condensent chez les jeunes historiens laïques du Québec de l’immédiat après-guerre.