Le prophète et la souveraine. Utilisation des récits biographiques de figures historiques par les guérisseurs betsileo (Madagascar) Olivia Legrip-Randriambelo LARHRA, université Lyon-II À Madagascar, une fois le nom d'un ancêtre oublié par ses descendants, il quitte l'ancestralité généalogique pour rejoindre l'ancestralité symbolique commune à tous. Cependant, certains individus restent dans la mémoire collective. Les figures historiques de la région betsileo, dans les Hautes Terres centrales de Madagascar, renvoient à des religiosités et à des périodes historiques diverses, tout comme le sont les guérisseurs qui les mobilisent. Je prendrai deux exemples : celui de la reine et guérisseuse Rabolobolo qui aurait régné sur le Betsileo au xix e siècle, et celui de Rainisoalambo, devin-guérisseur repenti du culte aux ancêtres et fondateur du mouvement de Réveil protestant (fifohazana) en 1894 dans un village betsileo. Comment les figures de Rabolobolo et Rainisoalambo se défont-elles du modèle classique de l'ancestralité malgache, voulant que les défunts intègrent une sorte d'anonymat après plusieurs générations, et comment accèdent-elles à une position « inoubliable » ? Ce texte propose une analyse de ces deux figures « populaires » et historiques dont les récits de vie extraordinaires renvoient à deux mouvements religieux (le culte aux ancêtres et le fifohazana, mouvement de Réveil protestant betsileo). Ces mouvements religieux et leurs principales figures locales apparaissent dans deux types de récits biographiques : ceux des devinsguérisseurs possédés par l'esprit de la reine et ceux des exorcistes, disciples de Rainisoalambo. Dans un premier temps seront présentés les deux personnages centraux dans les rites religio-thérapeutiques betsileo, puis il sera question de leur intégration dans les modèles stéréotypés de l'apparition du don de guérison chez