Nous rendons compte dans cet article d'une recherche effectuée à partir d'un corpus de productions écrites d'élèves de cycle 3 de l'école primaire française placés dans une situation de rappel de récit. Les élèves, après avoir entendu un conte africain intitulé « Les trois ruses de la gazelle » 1 , en ont fait un rappel écrit. L'objectif de cette recherche est d'examiner, à partir des traces langagières présentes dans ces textes, si des facteurs culturels peuvent exercer une influence sur ces rappels de récit. Nous nous intéresserons plus particulièrement à la manière dont les élèves traitent la ruse dans le premier épisode du conte. De manière générale, quels segments de l'histoire ceux-ci ont-ils privilégiés quantitativement dans leur rappel de l'épisode et quelles conclusions en tirer ? Plus précisément, qu'est-ce que les reformulations ou l'absence de reformulations liées aux ruses présentes dans l'épisode nous disent de l'interaction entre traitements cognitif et culturel ? Notre cadre théorique apparaîtra d'abord dans une analyse du texte source correspondant à ce premier épisode du conte, analyse qui s'appuiera sur une lecture anthropologique et lexico-sémantique. Puis il exposera les données psycholinguistiques convoquées pour l'étude des productions d'élèves. Ensuite, après une présentation plus précise de la méthodologie utilisée, nous livrerons notre étude des copies d'élèves dont nous disposons.
Cadrage théorique
1.1Une lecture anthropologique du début du conte : « les trois ruses de la gazelle » Pour résumer très succinctement le conte, une gazelle doit de l'argent à un léopard. Ce dernier, fatigué d'attendre, se rend chez la gazelle, qui fait diversion en lui faisant boire du vin de palme et en lui donnant une recette (fausse) pour fabriquer ce vin. Le léopard oublie sa demande et rentre chez lui, essaie la recette qui échoue et revient furieux. La