L'observation et l'analyse des institutions, canadienne et traditionnelles, à Kahnawake révèle que, sur le plan formel, on se trouve en face de multiples sources de normativité, étatiques et non étatiques, qui forment un pluralisme très complexe et évolutif. Au cours des dernières années, ce pluralisme juridique réel a diminué d'intensité, notamment à travers le transfert de légitimité et d'effectivité normative entre les différents ordres juridiques en cause, tout en maintenant intactes les apparences formelles d'un pluralisme à la fois intra- et extra-étatique. La domination d'un ordre juridique sur d'autres, sinon l'effectivité et même la survivance d'un ordre juridique donné, dépendraient de trois facteurs : les ressources financières, la crédibilité externe et la légitimité interne. On constate également des ressemblances entre le droit autochtone et le nôtre. Il y a similitude entre les wampums et nos lois constitutionnelles canadiennes, également imprécis, suscitant les mêmes mécanismes d'interprétation, et le même rôle, pour l'interprète, dans la production du droit. On note aussi la similitude des limites normatives, liées à une légitimité fondée sur la correspondance entre les valeurs que les producteurs du droit y inscrivent et les valeurs dominantes dans une collectivité.
Inscrit dans la perspective du pluralisme juridique — qui implique la reconnaissance d’ordres juridiques autochtones parallèles antérieurs à la colonisation, dont la survie les pose encore de nos jours en concurrence avec l’État canadien pour l’allégeance des Autochtones –, l’article qui suit analyse le contenu, la portée et l’ordonnancement des droits ancestraux des Abénakis qui en sont les héritiers et les interprètes, à partir de leur discours contemporain issu de leurs traditions normatives. Les résultats colligés mènent à croire qu’il existe désormais une nouvelle forme hybride et évolutive de pluralisme, où un ordre juridique, quoique formellement créé par l’État, mais sous-tendu par la communauté entière, énonce, interprète et applique, en fonction de sa tradition, un régime particulier fondé sur ses valeurs et, par conséquent, provenant de l’extérieur de l’État.
Tous droits réservés © Société québécoise de science politique, 2004Ce document est protégé par la loi sur le droit d'auteur. L'utilisation des services d'Érudit (y compris la reproduction) est assujettie à sa politique d'utilisation que vous pouvez consulter en ligne.https://apropos.erudit.org/fr/usagers/politique-dutilisation/ Cet article est diffusé et préservé par Érudit.Érudit est un consortium interuniversitaire sans but lucratif composé de l'Université de Montréal, l'Université Laval et l'Université du Québec à Montréal. Il a pour mission la promotion et la valorisation de la recherche. Résumé de l'article Aboutissement d'une réforme importante, la Loi portant ratification de l'Accord-cadre relatif à la gestion des terres des premières nations et visant sa prise d'effet soulève la question de savoir dans l'intérêt de qui elle a été conçue. Émane-t-elle de revendications des Premières Nations ou a-t-elle été imposée pour satisfaire les besoins de la majorité canadienne ? La réponse à ces questions conditionnera la légitimité et, sans doute, l'effectivité des mesures adoptées. Au terme de cette étude, il appert qu'il ne s'agit ni d'une réforme imposée d'en haut par un législateur représentant une population unanime, ni d'une réforme réclamée par une base autochtone unie. Ce serait plutôt une entente conclue entre, d'un côté, une minorité de groupes d'Autochtones désireux de s'engager dans l'économie de marché et, de l'autre, des autorités fédérales recherchant le désengagement de l'État et répondant aux désirs des banques en faveur d'un nouveau régime foncier conforme aux exigences de cette économie de marché. Ceci rend difficile la qualification de ces codes fonciers, qui ne se rangent ni dans le droit « local » canadien ni dans le droit « populaire » autochtone. LA RÉFORME DE LA GESTION DES TERRES DES PREMIÈRES NATIONS : POUR QUI ?Andrée Lajoie* Université de Montréal Éric Gélineau Université de Montréal Stéphanie Roberts Université de Montréal Alisa Kinkaid Université YorkDans l'exercice de sa compétence législative sur les « Indiens et les terres des Indiens 1 », le Parlement canadien a adopté plusieurs modifications à sa première Loi des sauvages 2 , toujours présumément dans leur intérêt et, récemment, dans le but officiel d'augmenter l'autono-
scite is a Brooklyn-based organization that helps researchers better discover and understand research articles through Smart Citations–citations that display the context of the citation and describe whether the article provides supporting or contrasting evidence. scite is used by students and researchers from around the world and is funded in part by the National Science Foundation and the National Institute on Drug Abuse of the National Institutes of Health.
customersupport@researchsolutions.com
10624 S. Eastern Ave., Ste. A-614
Henderson, NV 89052, USA
This site is protected by reCAPTCHA and the Google Privacy Policy and Terms of Service apply.
Copyright © 2025 scite LLC. All rights reserved.
Made with 💙 for researchers
Part of the Research Solutions Family.