Les mises en récit ou narrations jouent sur plusieurs plans dans une campagne de contre-insurrection. D’un côté, le contre-insurgé use d’une narration contre les insurgés qu’il combat pour tenter de modifier la manière dont les uns et les autres sont perçus au sein de la population qu’il tente de gagner à sa cause. D’un autre côté, le contre-insurgé bâtit très souvent sa propre narration interne – son propre « mythe » – à destination de l’opinion publique afin d’appuyer l’idée que la campagne militaire emprunte la voie la plus acceptable d’un point de vue éthique, celle de la protection de la population et de la conquête « des cœurs et des esprits ». Cette « fiction » fonctionne comme une structure de méconnaissance qui masque les conditions réelles dans lesquelles ces guerres sont effectivement menées et nous permet d’examiner la face sombre de l’histoire de la contre-insurrection.
Le processus de privatisation de la guerre a connu avec l’Irak un tournant historique. Le conflit irakien aura consacré un double mouvement d’industrialisation et d’institutionnalisation du mercenariat entrepreneurial, devenu un acteur clé du champ de bataille. L’abandon de pans entiers de la politique de reconstruction et de la stratégie de stabilisation aux mains des sociétés militaires privées amène à s’interroger sur l’évolution de l’externalisation et ses conséquences sur l’organisation future des forces armées américaines. Fait remarquable, à l’amalgame entre armées et sociétés mercenaires opéré dans le chaos de l’invasion en 2003 et 2004 est en train de succéder une véritable relation symbiotique entre ces deux pôles. À la lueur des retours d’expérience récents, c’est bien une intégration hiérarchique totale des prestataires militaires privés à la chaîne de commandement qui semble se profiler et qui augure une véritable révolution de l’identité des acteurs de la guerre, une révolution dont il convient de prendre toute la mesure puisqu’elle pourrait bouleverser profondément l’anatomie des conflits à venir.
Peu de temps après l’invasion de l’Irak en 2003, l’armée américaine a commencé à publier une doctrine consacrée spécifiquement aux opérations de contre-insurrection. Les manuels sont depuis devenus de plus en plus nuancés et insistent sur la nécessité d’accorder aux opérations de stabilisation une priorité égale à celle des opérations de combat. Cependant, quels effets ont réellement eu ces publications sur le département de la Défense (DoD), sur l’ US Army et sur le corps des Marines en particulier ? Cet article évalue le niveau d’apprentissage au sein de l’armée américaine et constate, qu’en dépit de nombreuses évolutions, d’importants pans de ces institutions restent marqués par des priorités datant de plusieurs décennies. Si l’armée américaine souhaite développer une force qui soit vraiment capable d’agir « sur tout le spectre des opérations » ( full spectrum dominance ), la publication de manuels doctrinaux doit s’accompagner d’ajustements et d’un effort de rééquilibrage dans l’allocation des ressources. Ce faisant, il est également crucial de contester les narrations montantes qui cherchent une fois encore à reléguer la contre-insurrection (COIN) à l’arrière-plan des priorités de l’armée américaine.
L’essor mondial de la piraterie et l’impossibilité pour les Marines occidentales d’assurer une présence globale et permanente sur les zones maritimes sensibles conduisent à s’interroger sur la résurrection possible d’une néo-flibusterie qui suppléerait à terme l’action officielle des États. Dressant un bilan de la recrudescence de l’économie criminelle du rançonnage pirate, l’auteur examine les enjeux et les défis liés à l’émergence de ces néocorsaires et souligne le retard de la France en matière de sociétés militaires privées, et qui la laisse impuissante face au phénomène croissant de privatisation de la sécurité internationale. L’État ne se prive-t-il pas là d’un instrument de choix pour affronter les mutations de la piraterie et de la guerre ?
Illustrée par le concept de Foreign Internal Defense , la politique de formation des armées étrangères est en train de connaître, à la faveur des retours d’expérience des guerres d’Irak et d’Afghanistan, plusieurs inflexions majeures. La sous-traitance des missions d’assistance militaire aux États étrangers en constitue le trait principal : là où les armées d’État ne peuvent ou ne veulent plus répondre aux demandes qui leur sont adressées, ce sont désormais des sociétés de services militaires, extensions informelles des États, qui prennent le relais. Cette sous-traitance s’impose de plus en plus comme un axe de recomposition critique de la stratégie indirecte des grandes puissances. Cet article est l’occasion de faire un point sur les changements affectant à la fois les pratiques et l’organisation des structures de formation et les modalités d’expression de la diplomatie militaire. Si les aspects tactiques et techniques des missions de formation des armées étrangères ont relativement peu évolué, la dimension politique (de l’assistance militaire pure à une approche globale d’assistance au développement des capacités de souveraineté) et stratégique (à travers la diffusion des normes militaires) sont devenus des enjeux centraux.
scite is a Brooklyn-based organization that helps researchers better discover and understand research articles through Smart Citations–citations that display the context of the citation and describe whether the article provides supporting or contrasting evidence. scite is used by students and researchers from around the world and is funded in part by the National Science Foundation and the National Institute on Drug Abuse of the National Institutes of Health.
customersupport@researchsolutions.com
10624 S. Eastern Ave., Ste. A-614
Henderson, NV 89052, USA
This site is protected by reCAPTCHA and the Google Privacy Policy and Terms of Service apply.
Copyright © 2025 scite LLC. All rights reserved.
Made with 💙 for researchers
Part of the Research Solutions Family.