La police nationale au défi des relations presse. Une information sous contrôle ? La police nationale est omniprésente dans les médias, tant dans le registre de l'information que dans celui du divertissement. Pourtant, cette publicité intensive ne va pas de soi pour une institution dépositaire de la force publique, fonctionnellement tournée vers le secret et soucieuse de sa réputation. Elle intègre de nombreux enjeux. À un premier niveau, la police trouve dans les médias une tribune providentielle pour promouvoir ses services, ses activités et ses résultats, et ce jusque dans les fictions grand public 1. Cependant, le foisonnement de ses apparitions médiatiques rend d'autant plus nécessaire mais difficile le maintien d'une image publique cohérente et positive. À un degré supérieur, les médias représentent une arène politique où se joue une lutte permanente pour définir la réalité et prescrire les orientations de l'action publique. Les journalistes remplissent une fonction de vigilance critique sur la politique policière et, plus spécifiquement, sur les usages de la force publique. Ils permettent notamment l'intervention de tiers extérieurs, qui viennent concurrencer les décideurs administratifs dans la gestion de la sécurité publique (Thoenig, 1994). Dans les termes de l'analyse stratégique (Crozier, Friedberg, 1977), les médias constituent une « incertitude cruciale » pour l'institution policière. On peut alors s'interroger sur les stratégies que celle-ci mobilise pour en conjurer les menaces et en exploiter les opportunités. Cette question a déjà été formulée en 1993 dans un numéro des Cahiers de la sécurité intérieure consacré aux relations police/médias : « Le ministère de l'Intérieur at -il une politique de communication ? » (Roger, Zamponi, 1993). Elle mérite un examen actualisé, intégrant la généralisation et la professionnalisation de la communication, constituée comme une activité spécialisée, avec ses doctrines, ses enjeux et ses techniques. À partir des années 1980, celle-ci s'étend du secteur privé aux administrations publiques, pour s'imposer comme une « nouvelle forme ou catégorie de l'action de l'État » (Ollivier-Yaniv, 1997, p. 80). Désormais, les institutions publiques ne veulent plus subir mais tourner à leur avantage le principe 1. Voir « Go Fast : pourquoi le ministère de l'Intérieur a "coproduit" le film », Mediapart, 4 octobre 2008.
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L'exposition de soi sur les interfaces numériques, les expérimentations qu'elle autorise et la réflexivité qu'elle favorise, suscite une abondante littérature. Mais leur appropriation par les groupes professionnels reste, dans une large mesure, un terrain en friche dans la recherche en sciences sociales. En France, la seule étude systématique sur les usages du Web par les collectifs de travail précède l'essor des blogs et des réseaux sociaux (Convert et Demailly 2007). Le dynamisme des enquêtes sociologiques sur l'intégration de l'informatique connectée dans les organisations 1 , ou des études didactiques sur l'appareillage technologique des apprentissages, contraste avec la faible attention consacrée à la « présentation électronique de soi 2 » (Denouël 2011 : 75) comme professionnel et à la mise en récit du monde du travail. Pourtant, l'effervescence observable sur les « médias sociaux » (blogs, forums de discussion, réseaux sociaux, sites de partage) n'épargne pas la sphère productive. De nombreux professionnels s'en saisissent pour narrer leur vie au travail et, ainsi, dévoiler le monde privé des professions. Les plateformes de blogs 3 , en particulier, sont un terrain propice à l'observation de ce phénomène, en vertu de leur diffusion rapide et massive. Certains blogs animés par des travailleurs se sont taillé un franc succès, jusqu'à intéresser les éditeurs. Et ce, jusque dans les professions les plus taiseuses, à l'instar de la police et de la justice 4. 2 Partant, on se donnera pour objet les écrits d'écran émanant de professionnels, concernant leurs expériences au travail, à destination de lecteurs initiés ou profanes. Plus précisément, on interrogera la reconfiguration des rhétoriques de métiers à la faveur de Quand une profession taiseuse se dévoile sur le Web : les ethè discursifs éla...
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