L'argumentation, point de rencontre de l'invention, de la disposition et de 1'elocution, représente sans doute la partie du discours rhétorique à laquelle dès les premiers témoignages jusqu'aujourd'hui on a consacré la plus grande attention. C'est en effet dans l'argumentation que le combat, pour ainsi dire, se développe.Sur ce point Aristote est d'une absolue intransigeance: "les seules armes avec lesquelles il est juste de lutter -dit il -, ce sont les faits, en sorte que tout ce qui n'en est pas la démonstration est superflu" . À l'analyse de cette démonstration il consacre donc la plus grande partie de sa Rhétorique. Dans le I a livre, au début du 3*"* chapitre, il nous dit: 'Trois éléments constitutifs sont à distinguer pour tout discours: celui qui parle, le sujet sur lequel il parle, celui à qui il parle; c'est à ce dernier, j'entends l'auditeur, que se rapporte la fin" (Rhet.1358 a 37-b 2).Cette affirmation, bien fameuse, contient en elle même la nécessité de 1 Rhet. 1404 a 5 ss. δίκαιον γάρ αύτοίς άγωνίζεσθαι TOÎÇ πράγμασιν, ώστε ταλλα Ιξω του άποδέίξαι περίεργα έστιν (pour les passages de la Rhétorique j'ai employé, sauf petites variations, la traduction de Dufour et Dufour/Wartelle. Édition "Belles Lettres"). L'importance attribuée ici aux πράγματα nous ramène au premier chapitre du premier livre où Aristote, en ouverte polémique avec les auteurs de τέχι/αι de son époque, oppose à la persuasion logique liée au πράγμα, la seule qu'il considère "technique", celle obtenue par ces éléments qui, n'ayant rien à voir avec la matière à traiter, comme le sont les passions reveillées dans l'âme des auditeurs, sont plusieurs fois définis comme εξω του πράγματος (Rhet. 1354 a 15; 1354 a 22; 1354 b 16 s.; 1354 b 27; 1355 a 2; 1355 a 19). Selon Aristote, ce qui devrait être superflu devient nécessaire à cause de la perversion de l'auditeur {Rhet. 1404 a 7 s.) ou de sa basse qualité (Rhet. 1415 b 5 s.): cf.