À partir des résultats d’une enquête en psychodynamique du travail menée avec des livreurs de plateformes, l’article postule que l’organisation du travail plateformisée est antisublimatoire, c’est-à-dire qu’elle ne permet pas aux livreurs de subvertir la souffrance normale liée à leurs activités en quelque chose de positif pour leur vécu subjectif, et qu’elle exacerbe toutes les dynamiques sociales et psychiques délétères qui peuvent naître dans des configurations de concurrence généralisée. En dépit de la stratégie de défense individuelle par auto-accélération mise en place pour pouvoir rouler de longues heures, ces livreurs partagent le fait de se retrouver étrangers à eux-mêmes, quand ils se rendent compte qu’ils participent à un « système dégueulasse » et « absurde ». Autant de situations menaçantes pour la santé mentale, car les livreurs font l’expérience de la trahison de soi, et sont fortement touchés dans l’amour de soi.
À partir d’une enquête en psychodynamique du travail auprès de livreur·ses de plateformes allégées de travail, les deux auteurs montrent que si l’imaginaire social véhiculé par les plateformes de livraison en appelle à la subjectivité des travailleur·ses quand elle s’adresse à elleux, le rapport subjectif au travail est en réalité entravé par l’organisation du travail, essentiellement dirigée par des algorithmes. L’action d’une forme de management désincarné renforce les processus de domination au travail d’une manière inédite : en mettant en jeu la passion pour l’autonomie et le désir de liberté, il peut finalement s’avérer dangereux pour la santé des livreur·ses, lorsque leurs croyances et leur investissement psychique sont finalement déçus.
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