Plus de quinze ans nous séparent aujourd'hui de la crise de la vache folle, déflagration majeure qui ébranla plusieurs piliers de nos sociétés contemporaines : les rapports entre science, politique et intérêts économiques, les formes d'intensification des productions animales, la confiance dans les produits alimentaires. Pour la revue NSS qui se focalise sur les liens complexes entre natures, sciences et sociétés, cette crise fut emblématique. Cet article et le commentaire qu'il suscite permettent de saisir les tensions encore aujourd'hui profondes liées à la normalisation de cette crise. Plus de dix ans après l'interdiction totale des farines animales, mesure à caractère symbolique dont on peut douter de l'efficacité en termes de gestion des risques, la Commission européenne propose un plan visant à utiliser en alimentation animale des protéines d'animaux transformées (PAT). À n'en pas douter, elles sont très différentes des farines animales et, selon les experts, leur utilisation permettra d'économiser de précieuses ressources énergétiques et environnementales. Le consommateur et le citoyen devraient en percevoir les avantages. Et pourtant. Les incertitudes sur la mise en oeuvre du plan, les questions concernant l'effectivité des contrôles mais aussi la réaffirmation de la rationalité instrumentale qui gouverne les productions animales montrent que l'invention des PAT n'a rien d'évident.
La RédactionAbstract -The paper presents an insight from epidemiology and geography on the BSE risk. The epidemic declined sharply following the ban of meat and bone meal in ruminant feed. BSE cases born after the ban and reinforced measures were due to cross-contamination between feed for monogastrics and feed for ruminants at the feed factory and on farms. Cross-contamination is difficult to control in the feed chain, particularly because contaminated material can infect cattle at very low doses. Designing separate feed processing lines or dedicating factories to ruminants is an efficient strategy, but is not economically feasible in the regions with low animal density. So, changes in control measures should target both the feed industry and farmers, and take into account the difficult economic context that limits the industry's ability to adopt the most effective solutions to prevent cross-contamination.Résumé -Risque ESB et utilisation des farines animales dans l'industrie de l'alimentation animale : perspectives dans le contexte d'assouplissement des mesures de contrôle. Cet article examine sous l'angle de l'épidémiologie et de la géographie la difficile gestion des farines animales en alimentation du bétail. Les études épidémiologiques ont montré une forte diminution du risque ESB suite aux différentes mesures d'interdiction des farines animales dans l'alimentation, mais aussi la persistance de cas dus à une exposition alimentaire liée aux contaminations croisées entre aliments pour monogastriques et aliments pour bovins à l'usine, pendant le transport ou en ferme. L'approche géographique a montré que l'industrie des ali...