Un entretien concernant les émotions et les sensations implique la mise en place d'une relation particulière poussant et permettant de faire le travail d'élaboration et de représentation de ce qui a été éprouvé. Cette relation engage l'intimité de l'enquêté qui se livre au-delà de ce qu'il parvient à expliciter. Il y a alors un enjeu à la fois éthique et méthodologique qui est similaire, même s'il n'est pas équivalent, à ce qui a lieu dans le transfert d'une cure psychanalytique. L'enquêteur en est responsable : toute faille dans son attitude d'écoute peut avoir des effets sur la manière dont l'enquêté perçoit sa propre expérience. Si cela n'influe pas nécessairement sur les résultats de la recherche, il faut prendre en compte cette question à partir du moment où l'objet d'étude est du « matériel humain » : des individus qui continuent à vivre avec ce qu'ils ont raconté après et au-delà de l'entretien. Mots clés ENTRETIEN COMPRÉHENSIF, ÉTHIQUE, ETHNOMÉTHODOLOGIE, INTIMITÉ, PSYCHANALYSE, RELATION « Tous les mots qui n'auront pu être dits, toutes les scènes qui n'auront pu être remémorées, toutes les larmes qui n'auront pu être versées, seront avalés en même temps que le traumatisme, cause de la perte. Avalés et mis en conserve. Le deuil indicible installe à l'intérieur du sujet un caveau secret. Dans la crypte repose, vivant, reconstitué à partir de souvenirs de mots, d'images et d'affects, le corrélat objectal de la perte, en tant que personne complète, avec sa propre topique, ainsi que les moments traumatiques-effectifs ou supposés-qui avaient rendu l'introjection impraticable. […] le fantôme de la crypte vient hanter le gardien du cimetière, en lui faisant des signes étranges et incompréhensibles, en l'obligeant à accomplir des actes insolites, en lui infligeant des sensations inattendues » (Abraham & Torok, 1987, p. 266).